Leurres emblématiques d’une certaine forme de power fishing, les crankbaits mériteraient à eux seuls un livre complet tellement cette famille compte de membres très différents les uns des autres. Ce qui les rassemble, la caractéristique commune à tous ces leurres, c’est leur mode de récupération, linéaire et continue, seulement agrémenté de pauses plus ou moins fréquentes ou longues.
Une technique fine
D’ailleurs, on appelle le fait de ramener un leurre au moulinet, le « cranking ». Ce mode de récupération qui apparaît aux yeux du profane comme simpliste peut s’avérer parfois d’une savante complexité, fruit d’une fine observation. Deux pêcheurs utilisant le même crankbait peuvent avoir des résultats opposés, en cause une pause plus longue, une trajectoire différente, une couleur particulière, une vitesse plus rapide, bref tout se joue à l’instinct, à l’observation et à la déduction : l’essence même de la pêche ! L’écueil du procès en simplisme évacué, nous pouvons aborder sereinement la pêche au crankbait en toute sérénité, car oui, l’utilisation de ces leurres reste d’une simplicité étonnante : on lance et on mouline, comme j’aime à le répéter.
La bonne profondeur
Si la taille du crankbait peut varier en fonction de l’espèce recherchée (brochet ou perche), pour le black bass la taille n’est pas un facteur primordial, si bien que la plupart des crankbaits à bass ont tous plus ou moins la même dimension. C’est donc bien la profondeur maximale atteinte par le leurre qui reste le critère décisif. C’est l’inclinaison de la bavette et sa taille qui déterminent cette profondeur et la parabole qu’il va effectuer sous l’eau pour atteindre les poissons puis remonter vers le pêcheur. De manière logique et même physique, cette parabole va se creuser avec des modèles très plongeants (deep diving crankbait) ou au contraire s’aplatir avec un modèle de surface (super shallow). En France, du bord comme en bateau ou en float tube, ce sont les modèles peu à moyen plongeurs qui sont les plus utilisés. Chez nous les black-bass sont en effet très présents dans les petits plans d’eau peu profonds et les rivières. Dans ces milieux, les bass actifs se positionnent généralement dans peu d’eau pour y chasser efficacement des écrevisses ou des poissons. Il est donc intéressant de disposer de plusieurs modèles, généralement trois : un modèle très peu plongeur qui va évoluer juste sous la surface et créer un sillage (que l’on nomme wake bait), un modèle peu plongeur, souvent avec une bavette carrée (square bill) qui va nous permettre de heurter les obstacles durs comme les bois morts, les piquets, et enfin un modèle intermédiaire qui va plonger jusqu’à 2 mètres pour pêcher efficacement les cassures, les piles de ponts et les rochers.
Heurter les obstacles
Lorsque l’on débute au crankbait, il faut bien avoir conscience d’une chose : la nage mécanique et linéaire du leurre peut permettre de capturer quelques poissons très facilement, mais c’est réellement votre façon de l’utiliser qui va rendre encore plus efficace votre technique. Le pêcheur doit casser cette linéarité en ponctuant la récupération de pauses. Mais il doit aussi tenter de heurter un maximum d’obstacles. Les structures verticales comme les arbres noyés, les troncs, les piquets de ponton, la base des piles de pont seront abordés avec des square bill. Les obstacles posés sur le fond, comme les troncs couchés, les rochers, les cailloux (blocs de roche, éboulis, graviers, sable) seront prospectés avec des crankbaits plus plongeurs, adaptés à la profondeur (1,5 à 3 mètres) de manière à racler le fond et heurter ce qui s’y trouve.
Le matériel adéquat
Une canne baitcasting d’environ 7’, soit environ 2,13 m, d’action regular, c’est-à-dire plutôt souple, est requise pour cette pêche sur fil tendu. Comme le poisson attaque durant la récupération, il est nécessaire que le scion plie sous le poids du poisson. Le black-bass doit pouvoir se retourner avec le leurre en gueule. Lorsque le ferrage interviendra, la canne sera déjà pliée et le poisson sera en position optimale pour être ferré. J’utilise la canne Illex pepper Magic Wand qui possède toutes ces qualités. Le moulinet devra afficher un ratio plutôt lent : entre 5.0/1 et 6.4/1, de manière à ne pas forcer et ne pas ressentir l’effet « marteau-piqueur ». Il sera garni de Nylon (ou de fluorocarbone direct) d’environ 0,28 à 0,33 mm selon l’encombrement des lieux, jamais de tresse. Concernant les leurres, j’utilise souvent les Cherry 10CC en coloris Red Craw et Muddy Roach. De petite taille, ils possèdent une belle sonorité. Si les obstacles sont très nombreux et variés (mix de bois et de roches), j’opte pour des Square Bill Aska 60 SR, plus lourds et faciles à lancer précisément mais silencieux, en coloris Red Craw, Muddy Secret Tiger et Agressive Perch.