Le soft stickbait, parfois dénommé stickworm, est un leurre souple dont la forme désuète se situe à mi-chemin entre le ver de terre et le stylo à bille ! Peu engageant au premier regard, cette forme s’avère pourtant redoutable d’efficacité. Les premiers pêcheurs à l’avoir essayé l’ont utilisé avec un immense succès sur un hameçon texan à large ouverture (wide gape en anglais), sans aucun plomb. Ce leurre se lance loin, coule lentement en dodelinant. Posé au fond, on dirait un ver. Lorsqu’on le jerke, avec des coups de scion, il effectue de très belles embardées. attractives comme un poisson proie. On a donc au bout de la ligne un leurre qui passe partout (branches, herbes, structures d’origine humaines), qui pêche lentement ou rapidement selon la récupération et qui imite tantôt un ver ou une sangsue, tantôt un poisson qui fuit. Polyvalent non ? Le montage texan restera le plus populaire durant plusieurs décennies, d’autant qu’avec une canne spinning ou une baitcasting, on peut le skipper sur plusieurs mètres sous les branches dans les zones ombragées où s’embusquent les black bass. Le soft stickbait est à ce jour le leurre qui ricoche le mieux, le plus discrètement et le plus loin. Il n’a vraiment aucun concurrent dans ce domaine.
Surveillez la bannière
Pour pêcher avec un stickworm, il n’y a rien de bien compliqué. Il faut apprendre à contrôler et à surveiller sa bannière, sa slack line comme disent les Américains. On lance le leurre et on attend qu’il coule. Durant la descente, on relève légèrement sa canne et on surveille cette bannière comme le lait sur le feu. Lorsqu’elle retombe, c’est que le leurre a atteint le fond, on secoue un peu le leurre, on le jerke ou on le tire simplement et, à nouveau, on surveille sa bannière. Si elle retombe un peu trop vite, ou à l’inverse si elle ne retombe pas : on ferre ! Si elle se décale, se déplace : on ferre ! Si la bannière tremble anormalement, si l’on sent un petit toc : on ferre aussi ! Un petit mot sur le ferrage. Pour qu’il soit optimal, il convient de mouliner un peu de fil avant de tendre très fort la bannière dans le même mouvement, sans à-coup, ni ferrage sec. S’il y a du vent ou du fond, rien ne vous interdit de rajouter un plomb texan (un plomb balle) de 3,5 à 7 grammes. Les pêcheurs de Floride, de Louisiane et du Texas le font beaucoup et ça marche plutôt bien en France !
Success-story du Senko
C’est dans la seconde partie des années 70 que Gary Yamamoto a créé le Senko en voulant imiter la nage du Slug-Go de Lunker City. Ce migrant d’origine japonaise s’est vite rendu compte que le design simpliste de son leurre (calqué sur la forme d’un stylo) le différenciait nettement de son modèle. Il était plus dense, coulait plus vite, bref il travaillait mieux dans la hauteur d’eau. Et avec l’adjonction de sel durant le processus de fabrication, le poisson le gardait en bouche plus longtemps ! Le Senko est toujours un best-seller aujourd’hui, et Gary Yamamoto a pu jouir de la réputation de son leurre pour entrer dans tous les bons magasins du monde, lui permettant de proposer d’autres modèles au succès plus timoré mais qui complètent l’offre (Fat Ika, D-Shad, etc.).
De nombreuses copies
Un tel succès n’est pas passé inaperçu aux yeux de la concurrence, qui n’a pas attendu longtemps pour sortir, disons-le franchement, des copies : Dinger chez Yum, Shim-E-Stick de Strike King pour les plus connus. Attention, ces leurres directement inspirés du Senko possèdent cependant des propriétés différentes et intéressantes. Le Shim-E-Stick est plus léger, plus souple, quant au Dinger, il est plus raide. Aujourd’hui, il existe des soft stickbaits plus éloignés de la forme originelle comme le Yammy Fish de Jackall, plus court et dense qui propose une bouchée plus petite mais des skippings tout aussi lointains ou le Realis Wriggle Stick de Duo, plus épais, plus lourd. Le succès commercial du Senko a créé à lui seul une catégorie de leurres à part entière : les stickworms ou soft stickbaits.
Perpétuelle renaissance
Le soft stickbait se réinvente lors de chaque innovation. Il a connu un regain d’intérêt lorsque le montage « wacky » est apparu et a été popularisé par Jackall avec son imitation de ver, le Flick Shake. Le stickworm en a profité pour redorer son image, insufflant au montage wacky d’origine plus de tonicité et de densité. Puis quelques années plus tard, le montage « neko rig » l’a conforté dans sa nouvelle application. Car si l’on peut pêcher en wacky aussi avec un simple worm, pour le neko rig en revanche, le stickworm est incontournable. Et lorsque le montage Ned Rig est sorti, tous les observateurs ont encore une fois été bluffés par l’incroyable polyvalence de ce leurre : c’était encore lui ! En taille plus petite certes, flottant, mais ce vieux soft stickbait était encore là. On pourrait vraiment croire que l’expression « faire du neuf avec du vieux » a été créée pour lui !
Les nouveaux montages
En plus du montage texan classique, il est possible de proposer ces soft stickbaits de diverses manières. En wacky, le ver (worm) est piqué au centre par un hameçon simple, plombé ou non. Le leurre s’anime presque surplace, par de très courts mouvements de scion (shaking).
Le neko rig est un montage wacky sans plomb. Sa particularité repose dans l’insert lesté en tungstène que l’on pique dans la queue du stickworm. Avec cette asymétrie de densité, le leurre bascule et coule droit. Une fois au fond, on l’anime comme en wacky, mais il reste vertical et visible de plus loin.
Pour le Ned rig, on utilise une tête plombée champignon et un petit soft stickbait flottant. Sa présentation verticale sur le fond ressemble très fort à un montage neko rig, mais plus plombé.