La pêche du sandre est souvent surprenante et c’est lorsque l’on pêche en verticale, à plusieurs dans une même embarcation, que l’on en a la plus flagrante démonstration. En effet, à deux ou trois pêcheurs dans un bateau, les lignes ne sont espacées que de quelques mètres et pourtant, on observe souvent que l’un prend tous les sandres pendant que les autres attendent encore leurs premières touches. Cette mésaventure m’est arrivée à plusieurs reprises. D’abord, on change de coloris pour se rapprocher de celle du voisin, puis on prend carrément le même leurre ! Puis la même plombée, le même diamètre de bas de ligne et enfin les premiers sandres arrivent. Cependant, il m’est arrivé plusieurs fois de constater malgré tout un écart important de prises par rapport à mon voisin. J’ai donc cherché à comprendre quel était ce paramètre supplémentaire que je ne prenais pas en compte et qui faisait encore tant de différence.
Le constat
De retour d’une partie de pêche ou j’avais pris un 10 à 2, qui plus est avec de gros sandres pour mon coéquipier, alors que moi je n’avais fait que deux petits poissons. Je suis rentré chez moi avec la ferme intention de comprendre pourquoi mon copain, pêchant avec le même leurre, le même coloris, le même attractant, le même grammage, la même forme de tête plombée et le même bas de ligne avait réussi, pourtant, à prendre beaucoup plus de sandres. Encore plus étonnant, je pêchais à l’avant du bateau et lui sur le même côté, mais à l’arrière. L’embarcation avançant, les sandres devaient logiquement voir mon leurre en premier, puis le sien quelques secondes plus tard. Malgré cela, il avait systématiquement les touches et pas moi ! Qu’elle était ce mystérieux paramètre qui faisait tant la différence ?
Le secret
Je filme toujours mes parties de pêche et mon coéquipier aussi. Ainsi, j’ai décidé d’analyser les instants qui précédaient chacune des prises de mon collègue et de les comparer lors des mêmes passages, avec ce que j’avais fait quelques secondes auparavant. La réponse était flagrante ! Alors que je pêchais classiquement sans faire d’animation, mon coéquipier allait systématiquement chercher le fond d’un mouvement lent puis, dès qu’il l’avait touché avec la même vitesse de déplacement, il relevait son leurre avant de le suspendre quelques secondes, immobile. Ensuite, il répétait l’opération. Ce jour-là, les touches se produisaient systématiquement lors des phases de descente. J’ai continué à analyser tout un historique de vidéos de parties de pêche en verticale sur deux années, afin de mieux comprendre ce phénomène. L’ensemble de mes analyses m’a permis de constater qu’il n’y avait pas une seule animation miracle.
Varier les animations
Comme on aurait pu s’en douter avec le sandre, plusieurs conduites de leurres peuvent du jour au lendemain devenir redoutables, ou complètement rédhibitoires. C’est pourquoi, il faut les connaître, les maîtriser et les mettre en œuvre à tour de rôle, pour déterminer laquelle sera la plus prenante du moment. Bien entendu, cela ajoute encore une variable dans l’équation à résoudre. Il faudra donc trouver le bon leurre, le bon grammage, le bon coloris, la bonne tête plombée, le bon sens de prospection c’est-à-dire à dévaler ou à remonter le courant (en eau courante) et bien entendu la bonne animation. Personnellement, si je devais faire un classement des paramètres les plus influents, je mettrais l’animation en numéro un, ex æquo avec le choix du type de leurre, notamment sa taille et le type de vibration qu’il produit (shad ou finesse notamment). Viendrait ensuite le coloris du leurre puis les autres paramètres.
Le Do Nothing
La première animation, qui n’en est pas une, est aussi la plus basique, ne rien faire, ne pas bouger. Elle était au cœur du dossier carnassier du mois dernier. Elle consiste à maintenir son leurre le plus immobile possible. Cette conduite est à la base de la pêche en verticale. C’est celle qu’on pratiquera le plus souvent. En effet, lorsque l’on recherche les sandres avec cette technique, notamment en fleuve ou en grande rivière, on ne s’adresse généralement pas à des poissons actifs. En effet, le sandre est un poisson dont le pic d’activité alimentaire culmine pendant la nuit. C’est pour cela que l’on a souvent à faire, dans la journée, à des poissons peu, voire pas actifs du tout. L’exception peut venir dans le cas de fortes crues, où la turbidité de l’eau abaisse la luminosité, ce qui génère des conditions de chasses propices tout au long de la journée. Lorsque les sandres sont peu actifs, ils peuvent réagir positivement à un leurre qui passe juste au-dessus de leur tête le plus lentement et statiquement possible. La proie semblant facile à attaquer, le carnassier déclenche une attaque par opportunisme.
Shad ou finesse
Parmi les éléments clés de la réussite en verticale, le choix du type de leurre souple est primordial. Deux grandes familles se distinguent. Les leurres de type shads présentent une caudale plus ou moins large imprimant au leurre une oscillation en rolling. L’intensité des vibrations et l’amplitude varient suivants la forme et la taille de la caudale. À l’opposé, les leurres souples dit « finesse » sont des leurres effilés qui n’émettent que très peu de vibrations. Ces deux types de leurres seront systématiquement à tester lors de la partie de pêche et ceci quelle que soit l’animation prenante du jour. En effet, même en « do nothing » un leurre finesse qui pourtant ne semble émettre aucune vibration pourra être beaucoup plus prenant qu’un shad ! Et parfois, ce sera le contraire.
Faire tressauter le leurre
Parfois, on observe des sandres qui semblent carrément endormis. Dans ce cas, il faut ajouter à l’animation de base « do nothing » une petite variante. Toutes les 30 ou 40 secondes, on imprime, grâce à une secousse sèche du poignet, un léger tressautement au leurre. Cela a pour effet de réveiller légèrement le sandre qui, attiré par cette secousse du leurre immobile à portée de gueule, s’en empare violemment. Voilà un ensemble d’animation qui a fait ses preuves et qu’il faut savoir mettre en œuvre. L’autre animation qui a notamment ma faveur en situation de crue en fleuve, c’est la présentation en ascenseur.
L'ascenseur
Lorsque les rivières gonflent, les sandres ont souvent des phases d’activités importantes, même en pleine journée. Dans ces conditions, je présente mon leurre à environ 40 centimètres du fond de manière immobile pendant 5 à 10 secondes, ensuite je le fais descendre lentement jusqu’au fond dans un mouvement régulier de 3 à 5 secondes. On peut même marquer une pause sur le fond. Puis je remonte le leurre, toujours de manière lente et régulière, jusqu’à son point de départ. Une fois arrivé, j’imprime le fameux tressautement mentionné juste avant. Je l’immobilise de nouveau 5 à 10 secondes et ainsi de suite. Les touches peuvent avoir lieu à la descente, à la montée, lors de la phase de suspension en haut du mouvement et même parfois lorsque le leurre est immobile sur le fond. Cette animation semble parfois faire une différence flagrante et on observe souvent le même jour des attaques ciblées au même moment du mouvement. C’est la phase de descente qui est statistiquement la meilleure. Vous l’aurez compris, la pêche du sandre est un vrai code qui change en permanence et qu’il faut savoir déchiffrer. Même en pêche verticale, la conduite du leurre a une incidence majeure sur les résultats, alors n’oubliez pas ces différents conseils lors de votre prochaine sortie. Testez-les !