Dans l’univers spécialisé de la pêche du silure, les leurres souples n’ont pas encore trouvé la place incontournable qu’ils occupent dans la traque des brochets, perches ou sandres. Si l’appât naturel reste le plus plébiscité, les boîtes de leurres durs et métalliques sont les premières remplies et sorties le plus souvent chez les traqueurs de glanes. Pourtant, les leurres souples offrent de nombreux avantages tout en garantissant une efficacité de pêche très satisfaisante. Peu onéreux et aujourd’hui bien démocratisés, ils permettent de couvrir des conditions de pêches diverses et des stratégies d’approches variées aussi bien en linéaire qu’en verticale, du bord comme embarqué, en pêche de prospection rapide ou pour insister sur un poste précis. Il n’est pas nécessaire de multiplier les boîtes à outrance pour être efficace. Quelques valeurs sûres bien combinées permettent de couvrir la majorité des situations.
Queue en faucille
Une fois n’est pas coutume, pour pêcher le silure, je place le grub au premier plan, devant le sacro-saint shad. En fonction de votre âge, vous appelez peut-être aussi ces leurres twists, virgules, ou encore « sandra » du nom propre devenu nom commun du célèbre leurre de la marque Delalande démocratisant cette forme d’appendice en faucille dès la fin du XXe siècle. Ces leurres souples à virgule possèdent toutes les qualités sans contrepartie. L’appendice vibratoire avec peu d’épaisseur de matière est extrêmement volatil et sa forme particulière lui permet de rester en mouvement et d’émettre des vibrations à la vitesse de déplacement la plus faible, et ce, même sur les grandes tailles qui m’intéressent particulièrement pour la pêche du silure, de 20 à 30 cm environ. Un simple petit flux d’eau de la rivière générera quelques infimes vibrations. Déplaçant moins d’eau et avec moins d’effet parachute à la descente, ces leurres me permettent d’utiliser des têtes plombées moins lourdes à taille égale que des shads à grosse battoir caudale, augmentant ainsi ma discrétion et mon confort de pêche.
Plus de vibrations ?
Du point de vue du silure, tout ce qui vibre sans faire peur est potentiellement intéressant. En grand opportuniste, qu’il soit leurré en associant ce morceau de plastique à une source de nourriture, par agressivité, ou simplement par curiosité, le meilleur moyen pour le glane de vérifier l’identité de cette chose qui se déplace doucement reste de mettre un coup de gueule dessus pour toucher, repousser, découvrir, goûter et éventuellement manger. Il existe des situations où les silures ont besoin de grosses vibrations soutenues pour réagir et pas autre chose. Dans ces cas de figure, plus rares d’après moi sur une saison entière et sur la majorité des postes, j’aime personnaliser mes grubs avec des palettes ou des bavettes de bladed jig devant la tête plombée. Je peux aussi basculer sur le second incontournable de cette grande famille : le shad.
Les shads
Le shad demeure également un pendant redoutablement efficace toute l’année pour capturer des silures. Avec sa caudale vibratoire, son rolling et les déplacements d’eau qu’il génère, impossible qu’il passe sous les radars des appareils sensoriels surdéveloppés des silures. Contrairement peut-être à une association d’idées plutôt basique « gros poissons / gros shads », je privilégie à 95 % du temps des modèles de 15 à 21 cm. Et pour les 5 % restant, je passe plutôt sur du plus petit que sur du plus gros. Finalement, des shads plus petits en moyenne que ceux employés régulièrement par les traqueurs de spécimen de brochets.
Choisir les couleurs
Dans l’univers sandre, perche, et même brochet, l’importance du choix des couleurs en fonction des conditions de pêche s’érige au rang de science ou de dogme… La teinte de l’eau, la luminosité, l’humeur des poissons, la couleur naturelle des mannes alimentaires sont autant de paramètres que les aficionados des leurres souples analysent, interprètent, et ajustent en quête du bon pattern. Pour ma part, considérant la faible acuité visuelle de silurus glanis au regard de ses extraordinaires facultés à détecter les vibrations, je ne m’embarrasse pas outre mesure avec une collection de coloris. Globalement, je dispose de trois catégories : les teintes naturelles, les flashy, et les foncées tirants sur le noir. En eau claire dans des couches d’eau avec une bonne luminosité, mes choix s’orientent sur le naturel puis sur les teintes vives type firetiger. En eau chargée, en condition de basse luminosité ou de grande profondeur, je mise sur les teintes flashy et foncées, le noir offrant un excellent contraste en condition sombre.
Bas de ligne et armement
Pour armer mes leurres souples, j’utilise soit des têtes plombées avec un hameçon simple très fort de fer et piquant, soit des têtes à visser qui laissent au leurre un maximum de souplesse et minorent le nombre de dépique en limitant l’effet de levier. Le second avantage est de pouvoir choisir avec précision l’armement et de le remplacer rapidement s’il est endommagé. Je ne suis pas adepte des triples qui ont tendance à plus accrocher en action de pêche. Les hameçons simples de type « claw single hook », présentant deux petites pattes soudées orthogonalement à la hampe leur permettant d’être piqués dans la gomme du leurre, ont ma préférence. Pour fixer mes leurres, j’utilise une agrafe rapide spécifique de forte résistance (de 60 à 80 kg) avec passage tire-bouchon, sans mécanisme d’ouverture, nouée sur un fluorocarbone ou de polynylon de 0,90 mm à la fin de ma tresse.