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Destination Saône et Loire

Pour faire un film, il faut une histoire, des acteurs, une équipe technique, des cameramen, un monteur... Je n’irai pas jusqu’à dire que nous n’avions rien de tout ça, puisqu’on avait au moins une commande de la fédération de pêche de Saône-et-Loire. Au-delà, c’était carte blanche.

TENTER de promouvoir la pêche de la carpe, que ce soit dans ce département ou dans un autre d’ailleurs, en cinq jours de tournage, le pari est osé. Mais « qui ose gagne » comme disent les darwinistes1. Il ne faut pas perdre trop de temps, être vite au bon endroit pour trouver les principales figurantes et capturer les meilleures images possible... Ce qui ressemble un peu, parfois, à vouloir attraper un pigeon voyageur avec un filet à papillon grand comme un capteur de smartphone.

Des paysages de rêves, de la Saône à la ZUP, et du Breuil à Montaubry !
Crédit photo :

SATANAS ET DIABOLO
Heureusement, nous avions aussi la plus fine équipe de tournage de tous les temps. Un cameraman pas cabot pour deux sous, spécialisé en vues subaquatiques, digne héritier de Jacques Mayol pour ce qui est de la plongée en apnée et du commandant Jacques-Yves Cousteau pour l’aisance derrière la caméra ; de la fratrie de Laurent Ballesta peut-être, ça je ne sais pas, mais frère de l’onde c’est une certitude puisque carpiste à ses heures perdues. Et que dire de son chef, Team leader de cette escadrille infernale, télépilote de drone tellement à l’aise aux manettes que lorsqu’il fait l’hélicoptère avec son engin, il sème la terreur dans toute la région Bourgogne- Franche-Comté ! Toutes les têtes rentrent dans les épaules, et pas que celle de Looping. À côté, la cavalerie aéroportée des Bells de Bill2, chargeant au son de la chevauchée des vaches qui rient3, c’est de la roulette de Samsonite. Et lorsque Satanas n’écume pas les nuages à la recherche de, Zéphyrin, ce faucheur de marguerite excelle aussi au sol. Si vous aviez vu ce fou du volant sortir en marche-arrière des ornières son 4x4 Mitsubishi posé sur la caisse, plus vite qu’un kamikaze décollant d’un porte-avions nippon après quelques verres de Givry, vous n’en auriez pas cru vos yeux. Nous non plus ! Si Papy Boyington avait eu un tel Zéro aux trousses en plein Pacific4, la carlingue de son Corsair eut compté plus de trous et de rustines que le zodiac que nous prêta Romain, et c’est peu dire… Heureusement nous avons capturé l’instant, tout est dans le smartphone ! Bref, avec cette équipe de têtes brulées, la même que pour « destination Lot » deux ans plus tôt, ça allait envoyer du pâté... Les bancs de Zephyrins n’avaient qu’à bien se tenir. Nous voici donc avec un département à mettre en avant, une équipe de tournage, il ne nous manquait plus que les acteurs et quelques figurantes moins tendues que Natacha5 pour poser devant la caméra.

Du sub, du drone, on garde le meilleur pour le DVD.
Crédit photo :

ON NE TE VOIT PLUS DANS LES SOIRÉES
Le casting initial impliquait deux Bertrand. Le premier des deux est un Châlonnais pure souche, qui a grandi (et c’est peu dire) dans la ZUP, à côté du lac éponyme. Le second est un petit suisse que Christophe avait rencontré lors du non moins célèbre Open de Châlon. Même si je n’avais pas vraiment mon mot à dire, moi ça m’allait plutôt bien puisque je connaissais au moins le grand Bertrand depuis le début des années 2000, lorsque nos récits de sessions s’échangeaient à travers une mailing list au son mélodieux des modems 56K, certes moins rapidement que ce satané virus vingt ans plus tard, mais bien mieux que les couples dans les clubs libertins fermés lors du couvre-feu... Quand j’y repense, ces échanges de mails ont alimenté mon goût du partage et, de fait, celui de l’écriture.

Poisson d’exception de la Saône dans les bras de Tof.
Crédit photo :

2061, RETOUR VERS LE FUTUR
On a pourtant dû changer notre fusil d’épaule et revoir nos plans. Le grand Bertrand a un genou en vrac. Il a dû se faire couper un tibia pour qu’il soit réaligné en prévision d’une prothèse. Un peu comme on fait un parallélisme avant de changer ses pneus, pour qu’ils
s’usent moins vite et durent dans le temps. Trois mois après, sur la route vers 2061, il se déplace doucement avec des béquilles et tout juste commence- t-il à reconduire. La route est longue et mon ami n’a pas d’autre choix que de prendre son mal en patience. De fait, la pêche c’est râpé pour lui pour quelque temps encore. Quant au petit Bertrand, son associé, il restera confiné en Suisse. Christophe en est donc quitte pour faire un nouveau casting, à la dernière minute. Je ne suis même pas inquiet car, sans vouloir balancer, c’est un peu sa marque de fabrique tant il excelle dans la procrastination et au final dans l’urgence. Je ne sais pas comment il se débrouille et je suis à chaque fois admiratif de sa capacité à retomber sur ses pattes, pour un ragondin d’un quintal. Après un appel sur les réseaux sociaux et quelques coups de fil, il n’aura pas trouvé deux pêcheurs, mais deux équipes, au grand damne de Satanas et Diabolo... Car, arriver à choper un départ en direct, c’est disons facile en faisant le pied de grue derrière une équipe, alors qu’avec trois distantes de plusieurs centaines de mètres, c’est plus coton. Apprenant cela, Satanas fit tellement de bons sur place qu’on le confondit avec le jouet propulsé en l’air. Diabolo et Satanas enchaînèrent donc les déplacements d’une équipe à l’autre, toute la semaine.


CASTING (AT THE RAIN) 6
La première équipe, ou l’équipe première devrais-je dire (charité bien ordonnée commençant par soi-même) était donc composée de Tof et de votre serviteur. Christophe m’avait proposé de l’accompagner lorsque nous pêchions les fullies et autres poissons rouges sur un petit privé bien stocké. Vu le contexte sanitaire, il n’est possible de pêcher légalement de nuit que dans un cadre professionnel… Comme nous avions toutes les accréditations nécessaires, l’occasion fit le larron. Et puis, comme je suis convaincu que Christophe est une de mes âmes soeurs, je n’ai pas pu lui refuser... J’avais déjà tenté de m’échapper lorsqu’il est venu me chercher pour écrire à nouveau dans la revue, il y aura presque quatre ans, comme Philippe était venu me proposer un sponsoring avec Nutrabaits (et Sert) au début des années 2000. Finalement bien m’en a pris à chaque fois d’accepter. Là, j’avais à nouveau quelques réticences... Je ne sentais pas cette session compte tenu des prévisions météo. Je prétextais que le pot de la ZX m’avait lâché (ce qui était vrai), qu’elle fuyait le gasoil (ça aussi), bref que je n’avais pas de moyen de locomotion... Mais à chaque fois que vous trouvez des problèmes, une âme soeur vous trouve des solutions. Christophe m’a proposé une voiture de loc, puis un autre plan B, je vous en reparlerai plus loin. On allait donc faire notre seconde session de 2021 ensemble, passer du privé au public, du luxe aux roots, du beau temps à la pluie... et c’est très bien ainsi puisque Christophe est pour l’éclectisme, même si je ne suis pas sûr que le ragondin ait beaucoup pratiqué depuis le lycée.

Nico enchaîne les belles prises.
Crédit photo :

DES PÊCHEURS SACHANT CHAUSSER
Dans son casting, l’équipe de réserve, comme on dit en jargon footballistique, se devait de représenter à la fois la diversité capillaire et celles des chaussants. Tof a donc choisi Romain, un grand roux avec des chaussures qui courent vite, achetées en promotion au Décathlon de Châlon, où il est vendeur carpe, à ne pas confondre avec son homonyme, un petit roux aussi mais avec des chaussures Korda. Rom fera équipe avec Fred, vendeur dans la même enseigne mais au chef-lieu Nivernais, qui lui portera des bottes, forcément7 ! En arrivant, nous en avons profité pour passer au magasin de Châlon et nous acheter en click & collect deux vestes de pluie, une XL dans laquelle je baigne un peu, et une avec un L et plein de X, pour celui qui ne fait plus d’éclectisme. Pour en finir avec Décathlon, c’est d’ailleurs marrant de voir comment l’histoire se répète, puisqu’on avait croisé complétement par hasard Thomas, le responsable carpe de la marque, lors de notre précédent tournage sur le Lot. D’ailleurs on a aussi recroisé Mickey dans le 71, enfin son cousin, et sa patate de forain.

DES CHASSEURS SACHANT PÊCHER
La troisième équipe est encore plus cosmopolite, avec d’un côté Nicolas, ex-militaire de carrière, chasseur de lapins, compétiteur et spécialiste de la pêche à la frappe (à lancer), originaire de cette pépinière de champions qu’est le sept-neuf. Bon, en fait, l’idée du plan B de Christophe c’était, vu que ma ZX n’avait plus de pot et transpirait le gasoil, que nous montions ensemble à Châlon... Je n’avais pas plus d’échappement, comme dirait Ribéry, que d’échappatoire... À bien y réfléchir, j’ai préféré emprunter la voiture de ma femme, plutôt que de monter à deux dans la Fiat 500 de Nico, pêcher avec deux cannes 6 pieds télescopiques calées dans sa remorque « suit vite » et avec en tout et pour tout, deux pots de flottantes pour la semaine. Je ne sentais pas le trip. À l’aller, Nico finalement seul, était tellement chargé (enfin sa voiture) qu’au premier virage, non point il dérapât, mais ses roues touchèrent sous les ailes... Il a dû faire demi-tour pour se délester de 60 kg de pellets ! Malgré cela, à chaque bosse, son dessous de caisse faisait des étincelles !


PEAU DE NIGLO
Comment décrire son binôme ? Imaginez un forain reconverti en chauffeur routier à cause du Covid, chassant moins le lapin et la maîtresse en maillot de bain du calendrier épinglé en cabine que le hérisson (animal en voie de disparition à cause de l’industrie auvergnate de porte-monnaie), vacciné tout petit avec une aiguille de phonographe trempée dans du red-bull,
et vous obtenez à peu près le portrait de Jonathan, dit Churros8. Quelle gouaille ! Jamais il n’arrête ! En fait, la rumeur dit que la production nous l’aurait imposé, comme le grand rouquin, afin de respecter le quota des minorités non sédentarisées. Churros et Nico, sur le papier, c’était le feu et la glace… Mais au final ça a matché, comme une bonne omelette norvégienne, au gasoil !

Une histoire peu commune.
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LES SITES DE PÊCHE
L’occasion nous était donc donnée de pêcher en Saône et de boucler ainsi, une autre boucle, dix-huit ans après. En effet, le 29 mars 2003, 500 carpistes manifestèrent dans les rues de Châlon/Saône jusqu’au lac de la ZUP, afin d’exprimer de façon symbolique9 leur mécontentement suite à l’enterrement du protocole Pêche de Nuit mort-né, proposé par le président de l’UNPF, lui-même, au forum de Montluçon un an plus tôt. Ce jour de mars 2003, les carpistes venus des six coins de l’hexagone s’approprièrent la cérémonie de mélange des eaux dans le lac de la ZUP et donnèrent naissance à l’UNCM.

Je ne vais pas vous refaire toute l’histoire et renvoie au premier tome10 de cette trilogie. C’était somme toute assez logique que Nico (porte banderole le 29 mars 2003) pêchât la ZUP, moins comme un pèlerinage que pour exploiter ses capacités techniques de compétiteur. Comme ont tendance à l’ânonner de plus en plus de carpistes « dans des conditions difficiles, il a réussi à tirer son épingle du jeu et la bouillette de saison a fait le job ». Pour une fois je ferai court, je dirai qu’il a bien pêché. Ce n’est pas Churros qui dira le contraire, lui qui pensait lui mettre une plumée, fort d’un match à domicile. Finalement il s’est rapproché, un peu, beaucoup de Nico, et une belle aventure humaine est née. Romain et Fred pêchaient l’entrée du canal reliant la Saône à la Loire, quant à Christophe et moi, nous étions postés à 800m à vol de Zéphyrin sur une pointe marquant l’entrée d’une base nautique sur la Saône. Ces postes nous semblaient tout indiqués en prévision de la montée des eaux, pour capturer quelques poissons venus se mettre à l’abri du courant. On a subi les assauts du vent toute la journée du dimanche, essuyé 24h de pluie ininterrompue le lundi, une grosse montée des eaux le mardi en fin d’après-midi.

La belle et la bête !
Crédit photo :

Si les conditions météorologiques étaient loin d’être top pour les pécheurs, c’est un euphémisme que de l’écrire, elles le furent pour la pêche. On s’est tiré une bourre virtuelle et néanmoins fraternelle avec l’équipe de réserve, à raison de six ou sept poissons par 24h sur chaque poste, avant de déménager pour le lac de Montaubry, à proximité du Creusot, rejoints par Nico et Churros à une dizaine de minutes de route de là, sur Torcy-le-vieux (ou le Breuil). On aurait bien voulu pêcher d’autres lacs, mais c’était techniquement impossible pour l’équipe de tournage, de suivre les pêcheurs répartis sur trois lacs... Elle s’est concentrée sur le dernier poste de Nico et Churros qui, lors de pêches en journée, se sont gavés sur des poissons rassemblés en prévision du frai. Ainsi, en cinq jours et demi de pêche, l’escadrille infernale attrapera une bonne centaine de Zephyrins, majoritairement des communes, mais pas que, avec une moyenne pour le Top 10 qui tourne autour de la vingtaine de kilogrammes. Au-delà de cette belle pêche, on a encore vécu une formidable aventure humaine à retrouver en DVD fin 2021 dans les kiosques. Romain et l’une de ses belles captures de la Saône. Action !


NOTES DE FIN
1 Who dares wins
2 pas Buffalo, il n’avait pas d’hélico, mais le lieutenant-colonel Bill Kilgore dans
Apocalypse now
3 Rien à voir avec Buffalo non plus. En vrai, le nom de la vache qui rit vient de
l’à peu près “walkyries”, lorsque les Français peignaient des vaches rouges sur
les trains de marchandises transportant le bétail pendant la seconde guerre
mondiale... Par pure moquerie envers les Teutons. Le nom est resté... Vous
savez désormais pourquoi la vache qui rit, rit !
4 Vu que je vais citer Décathlon, je suis obligé de citer Pacific Pêche et Natura
Pêche
5 Référence au film « Dikkenek »
6 J’aurais bien mis “casting at the sun” mais il n’y eut point de soleil
7 Les bottes de chef-lieu ou les bottes de Nevers, comme vous voulez
8 Parce qu’il vend des churros sur les fêtes foraines
9 Le Lac de la Prés Saint-Jean ou lac de la ZUP a été le premier secteur ouvert à
la PDN en France
10 Intégraal, chapitre 2 « Putain de carpistes », page 19

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