Pour mieux le connaître
Le lac du Der est situé non loin de Saint Dizier, sur les départements de la Marne et de la Haute Marne. Sa superficie de 4800 ha en fait le plus grand lac artificiel d’Europe. Construit à partir de 1967, il fut inauguré en 1974. Il sert aujourd’hui à désengorger la Marne pour éviter les crues de la Seine à Paris. Le lac du Der a nécessité des travaux pendant plus de 7 ans et sa construction engendra la destruction de trois villages : Chantecoq, Champaubert-aux-bois et Nuisement-aux-bois. Il ne reste aujourd’hui que l’église de Champaubert, poste mythique et ô combien convoité. C’est également un site ornithologique réputé pour la migration des oiseaux, avec plus de 270 espèces présentes sur le lac. On peut y observer le ballet magique des grues cendrées ou même, pour les plus chanceux, le pygargue à queue blanche, l’un des plus beaux rapaces au monde. Vous l’aurez compris, devant cette mer intérieure et cette faune et flore omniprésente, les amoureux de la photographie seront très largement servis.
Un réservoir à spécimens
Mais ce n’est délibérément pas pour cette raison que nous nous attarderons dans ce numéro sur ce géant, mais bel et bien pour le cheptel tout simplement hallucinant qu’il nous offre depuis des décennies et tout particulièrement ces dernières années. Tout le monde connait le potentiel exceptionnel du lac et ce depuis les années 80-90. De véritables cartons, des pêches exceptionnelles ont déjà eu lieu à cette époque avec des moyennes de poids hallucinantes. Les miroirs à bosses dites galiciennes qui peuplaient le lac et qui semblaient destinées à un avenir prometteur par leur taux de grossissement exceptionnel ont malheureusement connu une mortalité très importante et c’est sans nul doute majoritairement les communes qui peuplent désormais le lac.
Nous ne pouvions d’ailleurs pas commencer cet article sans évoquer l’un des poissons star, « Big Girl », qui a et fait encore fantasmer tous les amoureux de carpes géantes de la planète. Ce poisson qui dépasse allégrement la barre des 40 kilos a été capturé lors de sa forte médiatisation à un poids de plus de 44 kilos. « Big Girl » a fait couler beaucoup d’encre puisqu’elle a failli connaître un sort tragique, l’un des auteurs de sa capture l’ayant cédée à un propriétaire d’un petit plan d’eau privé de quelques hectares. C’était sans doute le trafic le plus médiatisé et hallucinant à l’époque. Fort heureusement, les réseaux sociaux ont suscité une forte réaction et les instances officielles de la pêche s’en sont mêlées. Devant la mobilisation de très nombreux pêcheurs et associations, ce poisson mythique a pu retrouver son eau d’origine. « Big Girl » semble d’ailleurs en parfaite santé puisque j’ai eu écho de sa recapture à un poids avoisinant cette fois-ci les 46 kilos. Cela laisse rêveur….
Mais l’histoire du Der et de ses carpes ne s’arrête pas là puisque nous assistons maintenant à la capture de nombreux autres poissons record. Ces trois dernières années, d’autres poissons flirtant avec les 40 kilos ont été pris, sachant que ce lac est très loin d’avoir révélé tous ses secrets. Nous sommes d’ailleurs très nombreux à penser qu’il héberge possiblement le record de la plus grosse carpe nageant en eaux publiques. Nous aurons très probablement dans les années à venir de belles surprises avec des poids dont nous ne pouvions pas imaginer l’existence.
Le lac du Der est composé de trois parties : le bassin sud, le grand Der et le bassin nord. Les convoitises se tournent souvent vers le grand Der mais depuis quelques temps, le bassin sud (qui avait la réputation d’être le « sauve bredouille » du lac avec des poissons de tailles plus modestes fortement représentés) a vu sa popularité s’accroître car plusieurs poissons de trente kilos y ont été mis à l’épuisette. Chaque année le bassin sud révèle de nouvelles surprises. Notons qu’il propose sûrement les postes les plus accessibles du Der et que c’est un bassin à vidange différée. Le niveau y reste donc plus stable toute l’année. Les nombreux hauts fonds, fosses, différences de substrat, souches, herbiers et roselières sont toutes des zones de tenue aussi intéressantes où peuvent évoluer de très gros sujets. Une nourriture naturelle plus qu’abondante participe également au fort taux de grossissement de ces poissons à la souche exceptionnelle.
Le grand Der, quant à lui, offre des accès souvent un peu plus énergivores. J’entends par là que nombre de ses postes sont accessibles en bateau, mais l’investissement en vaut la peine car c’est indéniable les plus grosses carpes du lac nagent dans le grand Der, même si pour moi les plus gros sujets sont souvent inaccessibles. En effet de nombreuses zones de quiétude sont strictement interdites à la pêche de jour comme de nuit, mais également interdites à toute embarcation (voir carte explicative). Certains se sont déjà risqués à pêcher dans ces zones de quiétude et force est de constater qu’ils y ont réalisé des pêches tout simplement dantesques, avec la capture de plusieurs carpes Goliath jusqu’ici inconnues. Vous l’aurez compris, des poissons sédentaires restent souvent dans ces zones et n’en sortent que rarement ou peut-être uniquement lorsque les eaux de certaines zones baissent sensiblement en toute fin de saison. Ce fameux marnage de fin de saison propre au grand réservoir reste d’ailleurs la saison de prédilection pour tous les spécimens hunters.
Parlons maintenant du bassin Nord. Souvent délaissé par sa complexité et avouons-le la forte présence de silures, il n’est néanmoins pas dépourvu de gros sujets lui non plus. Certes les carpes y nagent en nombre moindre, mais les plus courageux à force d’investissement et d’obstination ont déjà eu la chance de croiser le fer avec de vraies géantes. C’est peut-être pour moi l’endroit le plus mystérieux du Der et celui qui réserve aussi son plus grand lot de surprises. Dans la fin des années 90, je pêchais assidûment ce bassin avec déjà à l’époque la prise de gros sujets, nul doute que depuis ils ont dû bien profiter et grossir. La pointe de Larzicourt a été longtemps l’un de mes fiefs préférés car les possibilités d’exploiter les zones de pêche y sont énormes.
Le lac de toutes les convoitises
Comme je l’expliquais un peu plus haut, ce lac et son potentiel sont véritablement déroutant, il est devenu l’endroit le plus convoité de tous les chasseurs de poissons trophées. J’ai même personnellement un ami qui a acheté sa résidence secondaire sur les bords du lac pour espérer croiser la route un jour de « Big Girl ». Vous l’avouerez sur 4800 hectares, le challenge est osé mais rien ne semble arrêter ces pêcheurs obstinés, pas même le prix des réservations des postes de pêche qui atteignent tout de même la somme de 250 euros à la semaine. Cela n’est pas un obstacle pour certains amoureux du lac qui réservent parfois plusieurs semaines de pêche par an sur des zones différentes selon les saisons. Propre au cercle souvent fermé des amoureux de carpes géantes, il y a véritablement un échange d’informations entre les pêcheurs et en acceptant de partager à son tour, on peut savoir où les plus gros sujets ont été capturés les mois et années précédentes. Nous avons souvent vu les mêmes géantes de plus de 30 ou 35 kilos se faire prendre sensiblement sur les mêmes zones et à la même saison. C’est pour cela qu’il faut s’armer de patience pour espérer pouvoir pêcher les postes produisant statistiquement les plus gros poissons car ceux-ci sont très vite réservés et ce plusieurs années à l’avance.
A moins d’un coup de chance, il sera difficile de pêcher ces zones très convoitées. Les plus aguerris et motivés opéreront eux sur les nombreuses zones dites en pêche de jour qui sont par définition des endroits où la pression est moindre et qui peuvent abriter de belles surprises ; les géantes ont appris à délaisser et à se méfier des amorçages quotidiens et récurrents des pêcheurs qui opèrent sur les postes numérotés. Certes l’investissement de ce genre d’approche est énorme puisqu’il faut savoir replier tout son matériel la nuit tombant mais ces derniers temps, la pêche de jour au Der semble connaître de plus en plus d’aficionados avec pour certains une réussite qui ferait rougir les occupants des postes sur réservation. Comme souvent, dans cette pêche si particulière des gros sujets, les plus courageux et les plus obstinés sont récompensés. Attention toutefois à bien respecter les horaires de pêche et la réglementation en vigueur, car la garderie toute aussi sympathique qu’elle soit veille quotidiennement aux respects des règles et à la préservation du site.