Nous allons d’abord baliser de manière générale la démarche, puis nous nous focaliserons sur un des grands classiques : les bordures et les hauts fonds. Comment suis-je venu à cette idée du spot dans le spot ? Tout simplement en constatant qu’il y a très souvent (pour ne pas dire toujours) une canne qui produit beaucoup plus que les autres.
Genèse de la démarche : la suprématie de l’observation et de la précision
On peut faire référence à la fameuse expression selon laquelle il vaut mieux un mauvais appât très bien placé qu’un excellent appât très mal positionné. Je suis bien conscient que la réussite d’une pêche est la combinaison de nombreux facteurs dont l’appât est un des maillons forts. Mais le choix du poste, sa configuration, et la manière stratégique de l’exploiter sont sans doute la carte maîtresse dans notre façon de faire. En effet, les « hots spots » sont désormais des classiques et reconnus par la majorité d’entre nous. On peut se risquer à une liste non exhaustive : bordures, herbiers, hauts fonds, fosses, plateau, lit de rivières, obstacles, plages, digues, arrivée d’eau, îles, etc…
C’est de manière empirique et sensible, au fil des pêches, que nous avons déterminé avec mes amis cette idée de spot du spot. L’utilisation très fréquente du bateau amorceur et d’échosondeur embarqué de qualité nous ont très clairement permis de faire des observations fines et de pêcher de manière optimale. Trop souvent on oppose embarcation classique et bateau amorceur. En ce qui me concerne j’y vois une complémentarité plutôt qu’une opposition. En effet, j’aime dégrossir ma zone de pêche avec le bateau classique qu’on peut aujourd’hui associer (à condition d’être en règle) avec un drone. Une fois les hots spots repérés, j’aime déposer mes cannes au baitboat car très précis et plus discret. Combien de fois nous ne prenons pas le temps de bien sonder : une fois un haut fond trouvé par exemple, pourquoi ne pas prendre le temps de déterminer les différents substrats ? Dans ce cas, la canne à sonder et/ou le fil à plomb sont d’une aide précieuse et incontournable. Certaines marques ont même développé des produits spécifiques (style perche) pour « ressentir » et « échantillonner » les fonds. Tout ce qui peut permettre d’affiner la connaissance fine et précise des hots spots est bon à prendre.
116 poissons en 72 h : la démonstration en cas réel !
L’anecdote est assez remarquable pour clairement illustrer le propos. Je suis en pêche avec mon grand ami Pascal sur un plan d’eau d’une vingtaine d’hectares. Le cheptel est dense et de très beaux poissons sont présents. Pascal connait extrêmement bien les zones d’alimentation : notamment une zone de nénuphars et un très joli haut-fond grossièrement en forme de fer à cheval. Après avoir choisi le poste, nous posons très précisément les montages à l’aide de notre bateau amorceur. Pour les cannes pêchant les nénuphars et le haut-fond, nous utilisons le GPS qui permet d’être d’une précision diabolique. Ces deux cannes ont permis d’avoir des rafales de touches de façon bluffante. Deux trouées très spécifiques dans les nénuphars constituent réellement un spot dans le spot où les poissons se nourrissaient et passaient de façon très régulière. De la même façon, c’est une zone très précise du haut fond qui produit des touches de façon quasi systématique. Pêcher de façon moins précise sur ces spots rapporte inexorablement des touches mais de façon moins régulière. Pêcher les spots très précis que Pascal préconisait nous a rapporté des touches de façon hyper régulière : plus de 100 poissons en 72heures ! La recherche d’une extrême précision et conscientiser le spot du spot nous a permis de passer d’une pêche honorable à une pêche mémorable.
Créer un spot de manière artificielle : la validation définitive du spot dans le spot ?
En échangeant avec un pêcheur toulousain de renom, David Sutto, j’ai été encore plus convaincu de cette notion du spot dans le spot. A l’époque, il pêchait une gravière tapis d’herbiers à la recherche de deux poissons trophées. Il avait beau s’acharner à sonder de façon très précise et précautionneuse, il ne trouvait pas vraiment de spot propre autour des gros spots qu’étaient les herbiers denses. Il faisait des poissons mais pas assez à son gout. Il a alors décidé de créer artificiellement une zone de 5 mètres carrés avec du gravier qu’il a laborieusement déposé au fond tout près des gros herbiers, sur le passage supposé des poissons. Ainsi il a créé l’exceptionnel au milieu de la jungle aquatique environnante. Il ne lui a fallu que quelques nuits pour enchainer les beaux poissons. Cette anecdote permet encore de valider un peu plus l’idée du spot dans le spot !
Le cas des bordures
Les fameuses bordures sont des spots connus et reconnus depuis des années. Elles sont très diverses : tout ce qui sort de l’ordinaire peut potentiellement être intéressant à pêcher. Mais il convient de tenter d’être le plus précis possible aussi bien au niveau du repérage, que du placement de la ligne ou de l’amorçage. Il s’agit bel et bien de trouver le hot spot du spot de la bordure pêchée. Par moment, il faudra se résigner à accepter qu’il n’y a rien à comprendre et que c’est à cet endroit-là que les carpes produisent des touches et pas ailleurs : soit il n’existe vraiment aucune explication rationnelle, soit on aura pas su trouver la raison qui explique la régularité des touches sur ces quelques mètres carrés. Sans prétendre être exhaustif, le tableau suivant propose de faire la synthèse des grands cas que j’ai rencontrés dans la configuration des bordures.
Type de hot spot de BORDURE |
Caractéristiques |
Quand et pourquoi le pêcher ? |
Changement de substrat |
Très souvent dans les tous premiers mètres de la bordure (passage du mou au dur ou vice versa ; passage du sable à la vase…) |
Concentration de la nourriture naturelle Disposition morphologique remarquable et naturelle du fond qui intéressera instinctivement les poissons. Pêche à privilégier en sortie d’hiver et la nuit en été |
Petit lit marqué de gravier
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Concentration marquée de cailloux et/ou de graviers d’origine humaine ou naturelle |
Concentration des écrevisses notamment au mois de mai/juin et l’été |
Le bas d’une pente marquée ou petit différentiel de profondeur de 20 cm à 1 m (formation d’un petit plat dans la pente de bordure)
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Bien déterminer l’exacte limite entre la fin de la pente et le début d’un fond plat |
Accumulation et stagnation de la nourriture naturelle A pêcher l’hiver et par période de vent favorable
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Petite zone dure au milieu d’une vaste zone de mou ou petite zone de mou au milieu d’une vaste zone dure |
Trouver et bien délimiter la poche de dur ou de mou (plus elle sera petite plus elle sera complexe à trouver mais plus elle sera attractive pour les carpes) |
Exception dans la nature du fond qui va instinctivement intéresser les poissons. Cas de figure à privilégier sur les eaux à forte pression de pêche ou du moins là où la majorité des pêcheurs ont la même approche |
Présence en bordure (de façon visible ou non) d’un élément remarquable : obstacle, herbier, gros rocher, ponton écroulé
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Irrégularité qui constitue une zone de confort et/ou une zone d’alimentation |
A pêcher en priorité mais pas forcément de manière imprudente et pas systématiquement au ras de l’obstacle. |
L’extrême bordure
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Il n’y a pas besoin d’y avoir forcément un mètre d’eau pour que les poissons visitent l’extrême bordure : 30 à 40 cm d’eau suffisent bien souvent |
Pêcher en spot très léger et avec, dans le mesure du possible, les bannières détenues. A essayer en priorité sur les plans d’eau soumis à une forte pression de pêche ou sur les endroits où les poissons sont peu mordeurs |
La bordure « lointaine »
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Il s’agit de pratiquer la bordure éloignée : entre 5/6 mètres du bord et jusqu’à 20 mètres |
A essayer lors des premières pêches découvertes sur une nouvelle eau : selon notre expérience, certains poissons ont des « passages » naturels difficilement explicables
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Le cas des hauts fonds et les plateaux
Un haut fond est un relief immergé où la profondeur de l’eau est beaucoup moins importante que celle des points avoisinants. Dans le vocabulaire hydro-océanographique, un haut fond est une zone d’eau peu profonde, dangereuse pour la navigation. Dans le cas des hauts fonds, il y a une grande importance du soleil et du vent et de la profondeur à laquelle les hauts fonds se trouvent, sachant que selon la période de l’année le niveau des eaux varient (barrage, lac d’irrigation, vidange…).
Type de hot spot sur les HAUTS FONDS |
Caractéristiques |
Quand et pourquoi les pêcher ? |
Le sommet « dur » du haut fond
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Cas le plus classique qui est très souvent formé par une action humaine (pelle de tractopelle ou de pelle mécanique) |
A essayer en priorité sur un spot qu’on découvre. A cibler lors des journées chaudes hivernales. |
Le sommet « mou » du haut fond
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Partie molle ou poche de vase située sur le sommet du relief |
A essayer en priorité si l’ensemble du plan d’eau est constitué d’un substrat dur |
Le bas de la pente côté pêcheur
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Immédiate périphérie du haut fond situé entre le haut-fond lui-même et le poste du pêcheur |
A cibler en cas de vent favorable du fait de l’accumulation très probable de nourriture naturelle |
Le bas de la pente à l’opposé du pêcheur
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Immédiate périphérie du haut fond du côté opposé au pécheur. |
A essayer en cas d’échec ou de rares touches. Bien intégrer que tenter ce hot spot peut être délicat si le haut fond est très haut et/ou couvert d’obstacles ou de moules. A éviter absolument si on ne peut pas être sût d’assurer la sécurité du poisson |
La périphérie du haut fond
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Il s’agit des 10 ou 20 mètres qui existent devant le haut fond |
A pêcher dans le cas d’une eau surpêchée où les poissons fuient les spots saturés sans s’éloigner totalement de ces lieux |
Un herbier sur le haut du haut fond
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Naissance et présence d’herbiers en tous genres sur un haut fond |
A pêcher si le haut fond est très long ou s’il est très régulier. Penser à prévoir du matériel soluble pour protéger l’hameçon. |
Il est très difficile d’être exhaustif quant à ce thème des hots spots dans le spot. Il existe une multitude d’autres types de postes que nous n’avons pas évoqué mais qui sont tout aussi intéressants : les fosses, les arrivées d’eau, les îles, les plages, les obstacles en tous genres… Maîtriser la subtilité et la connaissance des postes que l’on pêche demande beaucoup de temps et d’application et parfois beaucoup de chance. L’essentiel étant de trouver le maximum de plaisir à la pêche !!!