Allons droit au but : qu’est-ce que tu changes dans ta façon de pêcher en automne ?
Cela dépend beaucoup selon que l’on pêche un plan d’eau avec une forte pression ou un lac avec un stock de poissons plus faible et peu de pression. Sur les lacs très pêchés où je pratique souvent, la plupart des poissons ont déjà été piqués plusieurs fois dans l’année lorsque l’automne arrive. C’est la période où dans un milieu naturel les poissons sont sensés constituer leurs réserves de graisse pour passer l’hiver. Traditionnellement, l’automne était donc le moment privilégié pour les gros amorçages et les sessions où les touches s’enchaînaient. Cependant, durant les 10 dernières années cela a changé, à mon avis pour trois raisons. La première est que les carpistes introduisent des appâts de qualité et en quantité toute l’année, ce qui fait que les réserves de graisse des carpes sont déjà bien constituées quand l’automne arrive. Deuxièmement, il ne faut pas sous-estimer la quantité et la variété de nourriture naturelle, et par exemple sur certaines eaux riches en Angleterre un amorçage lourd en automne conduit tout droit à l’échec. Il faut alors sortir des sentiers battus et essayer de comprendre comment fonctionnent les carpes sur le plan d’eau, avant de mettre en place une stratégie pour espérer tirer son épingle du jeu. Le troisième facteur est, comme je l’ai dit, que les carpes ont été prises plusieurs fois durant l’année et sont naturellement plus méfiantes.
La combinaison de ces trois points peut actuellement compliquer les pêches automnales bien plus que par le passé. Je pratique beaucoup d’eaux sous pression en automne, et je crois fermement au dictons anglais « less is more » : en mettre moins peut rapporter plus ! Une dizaine d’appâts éparpillés autour de votre montage peut rapporter bien plus que de pilonner votre coup d’amorce et d’attendre. C’est d’autant plus vrai que tout le monde adopte généralement cette même technique d’amorçage lourd en automne, ce qui ne veut pas dire que c’est la bonne ! J’ai obtenu de très bons résultats ces dernières années en amorçant avec très peu de chènevis et de noix tigrées. Si j’utilise des bouillettes, j’en mets également très peu la plupart du temps. N’oubliez pas non plus la grande efficacité des asticots et des casters, qui peuvent faire la différence et automne. A l’opposé, les eaux plus sauvages avec une faible pression de pêche et un cheptel de carpes moins important nécessitent une approche bien différente. Les apports en nourriture exogène (amorçage) sont très faibles au regard de la surface et ne « faussent » pas la prise de poids des carpes comme dans des eaux commerciales. Il est alors parfois payant d’adopter un amorçage plus agressif et d’attirer les carpes sur sa zone. Dans ce cas, j’utilise du chènevis et beaucoup de bouillettes.
Qu’est-ce qui est selon toi primordial lorsque l’on recherche les carpes en automne ?
Les mêmes règles que le reste de l’année s’appliquent en automne, et en premier lieu s’assurer de pêcher là où sont les poissons. Beaucoup de pêcheurs oublient cela, mais si vous n’êtes pas au bon endroit, c’est peine perdue et vous ne prendrez rien, aussi bonne soit votre technique et vos appâts.
Les carpes veulent gaspiller le moins d’énergie possible pour se nourrir, et utilisent le chemin le plus court d’une source de nourriture à une autre, et elles ne s’en détourneront pas pour visiter une zone où elles ne se nourrissent pas habituellement. Il est donc nécessaire de trouver les zones d’alimentation pour espérer réussir. Tout se joue dans la localisation, la localisation et … la localisation. Et c’est pourtant ce que néglige la plupart des pêcheurs…
Justement, est-ce que les carpes suivent des itinéraires ou des « schémas » particuliers en automne ?
Il y a quelques généralités sur lesquelles se baser, mais pour chaque règle il y a toujours une exception. Il suffit que je vous dise aujourd’hui qu’il faut pêcher dans la zone la plus profonde parce que j’y ai eu de bons résultats, alors tout le monde va y pêcher et inévitablement le comportement des poissons va changer et mon conseil sera devenu obsolète.
La seule et unique vérité est de pêcher là où l’on a vu les poissons en activité. Cela nécessite de vrais efforts et de la patience. Il faut observer, observer encore, marcher et … observer à nouveau ! On ne peut pas acheter un livre ou une revue et s’attendre à avoir la réponse toute faite à la question « comment prendre des carpes ». On peut parfois avoir de la chance à la pêche, et il en faut un peu c’est vrai, mais la seule règle qui me semble indispensable, le seul conseil valable que je puisse donner serait de regarder l’eau jusqu’à ce vos yeux piquent ! Tôt ou tard, vous verrez un signe d’activité qui vous indiquera la suite à donner.
On entend souvent dire que sur certains lacs il n’y a jamais de signes visibles d’activité, mais c’est simplement parce que les pêcheurs n’observent pas correctement. Après 35 ans de pratique de la pêche de la pêche, je peux vous dire qu’il n’y aucune eau où les carpes ne se font jamais remarquer. Durant l’automne, leur activité est souvent nocturne, de minuit à 4h00 du matin. Cela impose de se lever et d’écouter attentivement, mais cela en vaut la peine, car le pêcheur qui trouvent où sont les carpes est celui qui les attrapera. Il suffit ensuite d’avoir des appâts de qualité, un hameçon qui pique bien et un montage qui n’est pas emmêlé, le tout placé sur le bon spot. C’est la clé de voûte de la pêche de la carpe ! Beaucoup pense que c’est plus compliqué que ça, mais c’est faux. Tout n’est qu’une question de logique et de bon sens…
A propos des montages, est-ce que tu en utilises des différents pendant l’automne ?
Au Royaume-Uni, il est courant d’utiliser un montage rigide articulé de type « stiff hinge rig » avec une bouillette flottante flashy. Si une majorité de pêcheurs font ainsi, alors les carpes s’habituent et il devient difficile de les leurrer. Il peut donc être crucial d’éviter la norme et de se démarquer. Je pense que les lacs les plus faciles sont ceux où les pêcheurs adoptent un « style » identique après que l’un d’eux ait pris un beau poisson avec un montage spécifique. Parfois, un nouveau pêcheur arrive, pêche totalement différemment et obtient très souvent de bons résultats. Son montage devient alors la nouvelle norme pour tout le monde jusqu’à ce que quelqu’un d’autre se démarque.
Si les poissons se nourrissent de vos bouillettes et que vous présentez en eschage une pop-up fluo, c’est un peu comme si vous disiez aux carpes « arrêter de manger ces appâts que vous aimez et essayer quelque chose de complètement différent ». Dans mon esprit, si elles mangent mes bouillettes, je dois juste leur en donner une autre ! Elle se feront prendre car elles sont déjà en train de s’en nourrir. Si vous cassez cette dynamique, cela peut se retourner contre vous.
Quelles sont les conditions météorologiques idéales en automne ?
Sans aucun doute des basses pressions combinées avec une bonne phase de lune. Je veux dire par là une nouvelle lune ou une pleine lune, avec un peu de pluie. Ce sont les conditions parfaites pour moi.
Qu’est-ce qu’il ne faut absolument pas faire lorsque l’on cible les carpes en automne ?
Ne pas voir d’idées préconçues sur le spot qu’il faut pêcher. Si vous ou vos connaissances avez pris des poissons à un endroit deux ans auparavant, vous avez naturellement tendance à vouloir pêcher exactement le même spot et de la même façon. Ne soyez jamais influencés par les idées ou les résultats des autres. Suivez votre propre chemin et pêchez là où vous observez des signes d’activités de carpes. N’ayez pas non plus d’idées arrêtées à l’avance en matière de montage, et ne subissez ni mode ni influence. Si vous faites confiance à vos goûts et que vous suivez votre propre chemin, je peux vous garantir que vous aurez bien plus de succès que n’importe quel pêcheur qui suit le mouvement général.
Une phrase pour résumer la pêche de la carpe en automne ?
La seule règle véritable de la pêche de la carpe est d’observer l’eau pour trouver les carpes, et si nécessaire jusqu’à ce que vos yeux en pleurent…