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Pour pêcher loin du bord, adoptez le shore jigging

Les poissons pris depuis ces falaises sont bien mérités. Cependant la sécurité ne doit en aucun cas être négligée. 

Crédit photo Jean-Baptiste Nurenberg
C’est une approche fine, fascinante mais parfois déstabilisante voire fatigante. Le shore jigging est parfaitement adapté aux côtes abruptes comme la Méditerranée en compte beaucoup. Nous avons voulu en savoir plus en interrogeant le guide varois Michaël Martin, un expert de la technique qui permet de pêcher loin du bord.

C’est, comme souvent, vers les États-Unis et le Japon qu’il faut se tourner pour découvrir l’origine de cette approche dénommée shore jigging. La pratique consiste à propulser du bord, mais à très grande distance, des jigs métalliques pour parvenir à cibler certaines espèces que l’on a plutôt l’habitude de rechercher en bateau.

Le denti est de loin le plus beau et le plus puissant poisson de fond que l’on peut pêcher au leurre en shore jigging. 
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Un vrai challenge

Si, à première vue, la technique peut passer pour un puissant mais simple lancer-ramener à grande distance, ce qui serait limite rébarbatif, il s’agit en réalité d’une pêche très fine. La réussite passe par une vraie réflexion sur les conditions du moment, les profils, les poissons ciblés afin d’exploiter au mieux une colonne d’eau de plusieurs dizaines de mètres. Il s’agit donc d’un sacré challenge, à la fois physique, mental et technique. Arrivé en France il y a une dizaine d’années, le shore jigging est devenu l’une des grandes spécialités de Michaël Martin, un jeune guide officiant sur la côte varoise. « J’ai découvert ça en 2011, en regardant des vidéos japonaises, rappelle Michaël. Mais, à l’époque, le matériel spécifique manquait, il fallait vraiment s’adapter. Nous touchions seulement quelques petits chinchards ainsi que des maquereaux espagnols. Car le plus compliqué, en fait, c’était de dénicher les bons secteurs. » Et en effet, si en France le shore jigging est encore assez confidentiel, ce n’est ni par manque d’efficacité ni par difficulté, mais bien à cause de la typologie particulière des sites adaptés à cette approche. Le plateau continental doit en effet y être le plus court possible pour laisser rapidement place à des fonds abrupts.

Prudence

Dans tous ces environnements escarpés et abrupts où la houle peut se montrer très dangereuse, Michaël Martin rappelle qu’il faut être très prudent. Il préconise l’utilisation d’un bon gilet de sauvetage autogonflant qui se déclenchera automatiquement en cas de chute malencontreuse. Veillez aussi à être équipé d’une paire de chaussures adéquates. Pour Michaël d’ailleurs, le shore jigging est une approche qui devrait toujours être pratiquée au minimum en duo. Sécurité oblige !

C’est avec ces petits maquereaux espagnols, qu’il y a près de dix ans, Michaël a compris qu’il était sur la bonne voie. 
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

En Méditerranée

Pour Michaël, l’idéal, c’est une falaise rocheuse ou une digue d’où l’on peut atteindre des fonds d’une trentaine de mètres à seulement 50 m du bord. Ce n’est pas un hasard si la technique s’est essentiellement développée en Méditerranée sur le Var, les Alpes-Maritimes et la Corse. Les fonds mixtes y sont excellents, garantissant une vraie richesse piscicole. L’approche en tout cas oblige à sortir des sentiers battus et à découvrir des portions de littoral très sauvages. Entre autres atouts, c’est bien ce qui plaît à notre guide.

Jigs effilés (en haut) pour la pleine eau et plus trapus (en bas) pour les pêches à fond.
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Tout est possible

Mais au-delà de l’aspect baroudeur, il y a aussi et surtout le vrai potentiel du shore jigging. La technique permet en effet de toucher les petits poissons de roche de quelques centaines de grammes comme les grands pélagiques de plusieurs dizaines de kilos ! Chinchard, maquereau, pélamide, bonite, sériole, loup, barracuda, pagre, denti, dorade, pour Michaël c’est quasiment sans limite même si, à ses yeux, l’espèce phare est incontestablement la pélamide (bonite à dos rayé). « C’est en général par ce prédateur pélagique qu’on attrape le virus, fait remarquer Michaël. Ce carnassier du petit large aime se rapprocher des côtes pour chasser et sa défense est remarquable. Une fois, j’en ai piqué plus d’une vingtaine dans une matinée… Une sortie inoubliable ! » Fait rare en Méditerranée, Michaël Martin accorde beaucoup d’importance aux marées. « Il faut éviter les périodes d’étale et, dans ces conditions, je cible plutôt les poissons de fond, précise Michaël. Il suffit ensuite d’un peu de houle avec un peu de courant mais sans trop de vent, pour trouver une mer parfaite. Le top, ce sont les jours qui suivent une dépression. » Un bon pêcheur en shore jigging doit pouvoir shooter à plus d’une centaine de mètres. Au niveau de l’équipement, Michaël conseille d’opter pour une certaine polyvalence.

Le shore jigging est une approche pleine de surprises. Avec une colonne d’eau si vaste à explorer, on sait que tout peut toujours arriver ! 
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Le bon matériel

La canne doit en effet être à la fois sensible, tout en garantissant les distances de lancers. Notre expert utilise, lui, une canne de 3 m pour une puissance de 20-80 g et un moulinet spinning en taille 5000 à forte récupération (1 m/tmv), avec poignée en forme de boule, vrai plus en matière de confort de pêche pour Michaël. Une bonne tresse (22 à 25/100) et une pointe de 3 m de fluorocarbone complètent le tout. On trouve aujourd’hui sur le marché un matériel spécifiquement conçu pour la technique.

La daurade royale fait évidemment partie de ces belles surprises possibles. Encore une belle preuve de l’incroyable diversité qui entoure cette technique.
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Formes et couleurs

Le poids des jigs utilisés, avec une moyenne de 60 g, est déterminé en fonction du vent et du courant. Par conditions difficiles, Michaël peut monter jusqu’à 80 g. « La forme du leurre est très importante dans ma stratégie, tient-il à préciser. Avec les jigs larges, je vise les poissons de fond mais leur utilisation est plus fatigante. Pour les pélagiques, mes modèles sont au contraire effilés. Ils fendent mieux l’eau et la pêche est plus agréable ! » Michaël arme ses jigs de deux assist-hooks en tête, en prenant toujours soin que l’écart entre la hampe et la pointe de l’hameçon soit supérieur à la largeur du leurre. Il rajoute parfois un hameçon sur l’arrière du leurre quand les poissons de pleine eau semblent un peu délicats.

Les thonidés sont certes nombreux dans sa région mais pour Michaël, l’espèce phare à défier en shore jigging, c’est bien la pélamide.
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Michaël estime enfin que le shore jigging est essentiellement une pratique diurne tant l’aspect visuel a son importance, l’obligeant à adapter les coloris de ses leurres en fonction de la journée. Au lever du jour et à la tombée de la nuit, il mise généralement sur le blanc et le rose pour basculer sur le bleu en pleine journée. Par temps couvert, Michaël opte pour un coloris noir-argent. Et pour lui, vert et orange sont ses jokers, quand rien n’a vraiment fonctionné ! Michaël différencie deux types d’animations bien distinctes. La première concerne les poissons de roches, principalement les sparidés : sar, daurade, pagre, denti… Après avoir déterminé sa distance de lancer, Michaël fait descendre son jig jusqu’au fond, laissant la tresse filer entre ses doigts pour garder le contact car les touches survenant à la descente sont fréquentes.

Bonites et thonines font également partie des pélagiques courants dans cette partie de la Méditerranée. De quoi bien s’amuser aussi. 
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

Les deux animations

Il récupère alors par de puissantes mais lentes saccades, en reprenant à plusieurs reprises le contact avec le fond. Pour éviter d’accrocher, il reste très réactif et jerke très rapidement, bannière toujours en tension pour détecter le fond et les touches. La seconde approche, destinée aux poissons pélagiques, exige un jerking ample et plus rapide. Le jig évolue ainsi par saccades, en pleine eau. Michaël alterne parfois avec une récupération en linéaire, mais très rapide.

Une bonne adresse

Michaël Martin propose des sorties pour découvrir toute la technicité du shore jigging. S’il considère l’automne comme étant la meilleure saison pour le pratiquer, il accueille néanmoins ses clients toute l’année. Ce guide varois propose en outre de nombreuses autres prestations, principalement en mer mais également en eaux douces.
Contact : Michaël Martin - Tél. 06 64 96 89 11 - Site : www.latitudepeche.com

Lorsqu’il pêche à l’étranger, comme ici lors d’un beau voyage à Hawaï, Michaël n’hésite pas à approfondir un bagage technique pourtant déjà très solide. 
Crédit photo : Jean-Baptiste Nurenberg

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Magazine n°906 - novembre 2020

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