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Le saint-pierre, injustement méconnu

Le saint-pierre ne fait certes pas partie des cibles privilégiées des pêcheurs sportifs ce qui n’empêche pas certains de s’y intéresser de près.

Crédit photo Thierry Sauvin
Réputé surtout pour ses qualités gustatives, le saint-pierre est assez mal connu des pêcheurs en mer. Mais sa capture est toujours une heureuse surprise tant ce poisson, de la famille des zéidés, semble rare. Et pourtant, en adaptant ses recherches et ses techniques, on peut réellement cibler l’espèce.

Corps aplati, gueule protractile et disproportionnée, parure dorée et marron, nage de travers et sons gutturaux, une fois sorti de l’eau, tout ça fait du saint-pierre un poisson unique. Pour beaucoup, un saint-pierre se prend un peu par hasard, en pêchant le lieu au leurre souple, par exemple. Mais en fait, on peut réellement orienter une sortie si on sait où, quand et comment le séduire.

L’action se déroulant à l’aplomb, une canne de puissance moyenne est suffisante. Cela permet en outre de ferrer les poissons sans brutalité.
Crédit photo : Franck Ripault

Une pêche d'été

Présent en Méditerranée et dans l’océan Atlantique, le saint-pierre, dont la taille peut atteindre 60cm pour un peu plus de 4kg, apprécie les grandes profondeurs, jusqu’à 600m, surtout en hiver. Heureusement pour nous autres pêcheurs, il s’aventure l’été sur les hauts-fonds de 10 à 40m. La meilleure période va de mai à septembre, avec un pic au mois d’août. De juin à août, période de sa reproduction, il s’approche des côtes et s’aventure sur des secteurs moins profonds mais toujours sablonneux, souvent au voisinage de roches. C’est pourquoi la réussite tient dans une bonne connaissance du terrain de jeu. Le sondeur-GPS est en cela un outil indispensable.

Le sondeur-GPS se révèle indispensable tant la localisation des spots favorables est un élément incontournable.
Crédit photo : Thierry Sauvin

Le saint-pierre est surtout actif par mer calme, aux basculements de marées, et plus précisément lors de la première heure du descendant ou du montant, quand le courant est encore modéré. Dès que le courant se renforce, à partir de la seconde heure, les touches se font plus rares. On privilégie donc les petits coefficients de marée (45 à 65). Les lève-tôt et couche-tard auront davantage de chances de le rencontrer. Comme tous les poissons, le saint-pierre apprécie la tranquillité, surtout pendant la période estivale. Ce saint-pierre est un prédateur éclectique : il se nourrit de petits calamars, anchois, sprats, sardines et lançons. Présents sur les secteurs sablonneux, ces derniers sont ses mets préférés. C’est aussi un opportuniste qui ne se tient pas nécessairement près du fond. Il peut évoluer dans toute la colonne d’eau, là où se tiennent les bancs de petits poissons.

Thierry, qui pêche plus souvent bars et lieus, reconnaît bien volontiers que le saint-pierre est loin d’être le combattant le plus acharné des eaux bretonnes. Mais ce très beau poisson a d’autres atouts à faire valoir…
Crédit photo : Thierry Sauvin

Le matériel

Côté matériel, la canne doit être à la fois sensible pour détecter la touche et suffisamment puissante pour accepter des leurres plombés jusqu’à 120g, maniés à la verticale. Une canne casting de 2,10m (puissance 20-60 g) est idéale pour ce genre d’exercice. Ce type de canne accepte ces leurres lourds à condition de ne pêcher qu’à l’aplomb du bateau. Avec un modèle casting conçu pour le slow jigging, relativement souple et sensible donc, on maîtrise mieux l’animation du leurre, surtout à la descente. Après contact avec le fond, un quart de tour de manivelle suffit pour décoller le leurre ce qui réduit considérablement les risques d’accrochage.

Le saint-pierre se déplace souvent au sein de bancs d’individus de même taille. Si l’on pêche avec discrétion, il est ainsi possible de s’offrir régulièrement de très beaux doublés.
Crédit photo : Thierry Sauvin

Le moulinet est garni d’une tresse en 16 ou 18/100, si possible multicolore afin de bien identifier la profondeur où se trouvent les saint-pierre. Pour le long bas de ligne en fluorocarbone, la finesse (25 à 28/100) est de rigueur. Pas très vif mais sacrément rusé, le saint-pierre, par sa technique de chasse, a le temps de flairer la supercherie. En été, la luminosité et la clarté de l’eau le rendent évidemment encore plus méfiant. Côté action de pêche, animer un leurre souple comme pour le bar ou le lieu en traction est voué à l’échec. C’est pour cette raison que les captures de saint-pierre semblent toujours quelque peu anecdotiques.

Même s’il n’atteint pas franchement des tailles gigantesques, le saint-pierre est tout à fait capable d’engloutir de gros leurres souples.
Crédit photo : Thierry Sauvin

Une action lente

En revanche, avec une animation verticale, lente et linéaire, sans à-coup, tous les espoirs sont permis. Avec un leurre souple, on prend contact avec le fond puis on le remonte lentement, avec régularité, grâce à quelques tours de moulinet. On reprend contact, on remonte… et ainsi de suite. Si les touches tardent un peu, n’hésitez pas à remonter plus haut le leurre car le saint-pierre peut se trouver entre deux eaux voire bien plus haut si le menu fretin s’y trouve. Que ce type d’animation lente et régulière fonctionne est certainement dû à ses piètres qualités de nageur. Il faut dire aussi que sa forme, peu aérodynamique, et la petitesse de sa caudale ne l’aident pas vraiment à affronter le courant. Le saint-pierre chasse à l’affût en se laissant dériver lentement dans le courant jusqu’au moment où une proie imprudente passe à sa portée.

Attention au moment des décrochages, les nageoires dorsales, pectorales et ventrales sont pourvues d’épine.
Crédit photo : Thierry Sauvin

Si l’action de pêche peut donc s’avérer un peu fastidieuse, il importe néanmoins de rester attentif car la touche, elle aussi, est singulière. Ne vous attendez pas à recevoir une vraie châtaigne d’un chasseur comme le lieu. La touche est marquée par un toc, certes sensible mais qui n’a rien d’exceptionnel, ou bien une tirée donnant l’impression que le leurre est comme aspiré. On ne ferre pas à la touche, on accompagne légèrement en baissant la canne avant d’assurer le ferrage. En douceur car le saint-pierre a une gueule très fragile ! Voilà une autre bonne raison d’utiliser une canne qui ne soit pas une trique.

La gueule du saint-pierre est à la fois très grande et très fine et donc très fragile. C’est la raison pour laquelle les ferrages et les combats doivent être menés avec une grande délicatesse.
Crédit photo : Thierry Sauvin

Une défense brève

On entend dire parfois que le saint-pierre se défend comme une serpillière. Là aussi, il convient de relativiser. S’il est vrai que sa défense n’est pas exceptionnelle, un beau spécimen peut donner du fil à retordre sur un matériel léger. Un beau 4kg prend du fil et se débat même si le combat, c’est vrai, est bref. Dans la majorité des cas, l’hameçon est piqué au bord de la gueule alors que celle-ci est énorme et que le saint-pierre aspire ses proies. Preuve de sa grande méfiance et de sa capacité à recracher très vite. Dans l’épuisette, attention aux mains car ses nageoires sont garnies d’épines. Un gant de protection est bien utile pour le décrochage.

Les leurres souples dominent, à condition qu’ils soient d’une très grande souplesse. Un shad de 20cm, monté sur une tête plombée de 60 à 120g, ne fait pas peur au saint-pierre. Si le fond est important, on utilise une tête profilée pour fendre la colonne d’eau. Quant aux couleurs, le rose semble attiser sa curiosité. Les coloris bleu et blanc marchent aussi quand le saint-pierre est focalisé sur un banc de sardines. Si les touches sont rares ou discrètes, n’hésitez pas à utiliser un gel attractant parfum sardine : le saint-pierre adore ce petit poisson bleu.
Crédit photo : Thierry Sauvin

L'avis d'Emmanuel Adam

« J’ai l’habitude de rechercher le saint-pierre en Bretagne, du côté de l’île de Sein. S’il peut être isolé, ce poisson évolue le plus souvent en bancs composés d’individus de taille similaire. C’est un poisson curieux certes mais tout de même méfiant. C’est la raison pour laquelle il faut pêcher fin et très lentement. La touche, qui a lieu souvent lors de la remontée du leurre souple, est parfois très discrète, marquée par un ou deux tocs. C’est une pêche qui demande une très grande attention. »

 

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