Les ombres sont friands de trichoptères. Cela tombe bien, car plusieurs espèces sont présentes durant une bonne partie de l’automne. Le plus emblématique est le sedge cannelle mordoré, mais le pêcheur va aussi bénéficier tout comme les autres des sedges bruns et des argentés accompagnés de ceux de la famille des Rhyacophilidae aux ailes brun blond. Ils ont tous une taille de 10 à 15 mm de long. Leurs émergences sont en petite quantité, mais répartie sur l’après-midi et début de soirée dans la plupart des rivières à ombres de seconde catégorie.
Crédit photo : Thierry Millot
Dans les veines de courant
Au fur et à mesure que l’été s’est installé et que la thermie des cours d’eau a grimpé, les ombres se sont positionnés au sein des secteurs rapides constitués de veines de courants ou sur les radiers. Là où l’eau est plus fraîche et l’oxygène dissous en plus grande quantité, ce dont ils ont besoin pour vivre sereinement et avoir une activité alimentaire plus importante. Dans la plupart des rivières où ils sont bien représentés, ils y resteront jusqu’à fin octobre, voir mi-novembre. L’une des façons les plus attrayantes de les pêcher est de leur présenter un sedge, en plein bouillon, au milieu des clapots de vaguelettes et des veines de courant bien marquées, ayant une profondeur maxi d’un mètre. Dans ces zones rapides, il faut s’attendre à des gobages éclair de poissons montant comme des balles pour se saisir de la mouche dérivante rapidement. Concentration et sang froid sont de rigueur pour ne pas cas ser sur les ferrages réflexes, qui sont monnaie courante lorsque l’on pêche l’eau. Excitation et émotions garanties lorsqu’un ombre aspire ou éclabousse quand il vient en surface se saisir de l’artificielle sur ces secteurs sous tension.
Crédit photo : Thierry Millot
De petites dérives aval
Il ne faut pas s’attendre à voir des gobages dans les rapides ou rarement. Il est nécessaire de pêcher l’eau en peignant par petite touche avec sa mouche partout où il n’y a pas de bouillonnement d’écume blanche, zones de surface trop brassées où les ombres gobeurs ne peuvent pas voir une mouche. Dans les rivières de taille moyenne à large, je pêche souvent en descendant, en choisissant des dérives aval assez courtes, de 1 à 2 m en fonction de l’agitation de surface. Je préfère pêcher à courte distance, canne haute en faisant en sorte, si possible, que le bas de ligne ait une longueur de canne de soie sur la surface, surtout si celle-ci est bien agitée. Sur ces surfaces en mouvement, il est préférable d’optimiser la flottaison du bas de ligne (et la moitié de la pointe) à l’aide de gel hydrophobe afin d’éviter qu’il soit aspiré sous la pellicule provoquant dragage et noyade de la mouche, ce qui mettrait les ombres en alerte. Une canne de 10 /11 piedd, associée à une soie légère de 2 ou 3, est un bon compromis pour gérer les dérives et ferrages en eaux rapides. Avec une pointe en 12/100 de 1 m à 1,5 m maxi, on s’assure une bonne souplesse de dérive dans les vagues et remous avec suffisamment de résistance pour pouvoir ferrer sans souci.
Crédit photo : Thierry Millot
Le facteur visibilité
Mes mouches favorites pour traquer les ombres dans les courants d’automne sont montées sur des hameçons en taille 12 et 14 à hampe standard qui permettent de réaliser des imitations correspondant à celles des insectes naturels qui dérivent sur l’eau. Le facteur visibilité de la mouche sur surface agitée où il y a plus de réverbération est à prendre en compte. Les teintes beige clair ou dorées des ailes et l’ajout de toupet synthétique fluo permettent de garder un œil sur la mouche. Mes fidèles sedge chevreuil beige avec toupet rouge fluo, sedge cannelle doré et le sedge mousse sont mes favoris depuis de nombreuses saisons. Ils ont toutes les qualités pour la pêche des Thymallus en eaux vives, flottaison, visibilité et silhouette adaptée. À de nombreuses occasions, j’ai côtoyé des pêcheurs en attente de gobage sur les grands plats lisses et miroitants sous le soleil d’automne, sans que rien ne se passe. Certains m’ont vu poser mon sedge sur une belle veine de courant et apprécié la courbure du carbone de ma canne, plié par un bel ombre vigoureux. Ils firent de même, avec satisfaction, alors qu’ils pensaient que la pêche de l’ombre en automne ne se pratiquait que sur les surfaces calmes. Alors, si vous ne voyez pas un rond sur ce grand plat lors d’un après-midi sans éclosion, allez voir s’il n’y a pas un grand étendard prêt à engloutir votre sedge dans les courants situés en amont ou aval…
Crédit photo : Thierry Millot
L’ombre, une espèce à protéger
L’ombre commun est un salmonidé entièrement dépendant du courant dans lequel il évolue et qui lui apporte sa nourriture par dérive de ses proies préférentielles, insectes ou crustacés. Présent à l’origine dans les bassins du Rhin, du Rhône et de la Loire, sur les zones de plateaux ou de piémont, il a perdu plus de la moitié de son linéaire d’origine avec la construction des barrages au XXe siècle. À l’inverse, il a été introduit avec succès dans des régions où il n’avait jamais existé. Ce poisson est aujourd’hui aussi menacé par le changement climatique, il faut donc en prendre soin et le protéger. À cet effet, il serait souhaitable de décaler d’un mois l’ouverture de sa pêche et de prolonger sa quête en automne, puisqu’il est, à cette saison, au meilleur de sa forme !
Les sedges de Thierry
1. Sedge Tag
- Hameçons : taille 14 à 12, JMC DR30BL
- Fil de montage : 6/0 marron JMC
- Corps : fil 6/0 marron JMC
- Aile : fibres de plumes CDC kaki et fibre chevreuil beige
- Tête : dubbing lapin beige
- Tag : fil néon rouge fluo JMC
2. Sedge Cannelle doré
- Hameçons : taille 14 à 12, JMC DR30BL
- Fil de montage : 6/0 marron JMC
- Corps : fil 6/0 marron JMC
- Aile : fibres de plumes CDC sable et fibre chevreuil teinté cannelle doré
- Tête : dubbing lapin cannelle
3. Sedge mousse
- Hameçons : taille 14 à 12, JMC DR30BL
- Fil de montage : 6/0 marron JMC
- Corps/aile : bandelette mousse 3 mm beige JMC
- Collerette : fibres de plumes CDC kaki
Crédit photo : Thierry Millot
