Le domaine de 15 hectares laisse donc de la place pour la douzaine de pêcheurs maximum qui ont la chance de le parcourir chaque jour. Cette diversité est ce que je recherche lors d’une sortie hivernale, pouvoir utiliser mon matériel de rivière et ne pas forcément avoir à lancer un train de streamers toute la journée… Le temps froid est idéal pour les ombles qui, avec la chute des températures, deviennent de plus en plus actifs.
Une pêche fine
Ma canne préférée, pour prospecter les eaux du Moulin, est une 9 pieds soie de 5 et une ligne flottante. L’omble Alis est encore assez peu connu des pêcheurs, mais il est pourtant parfaitement adapté aux rudesses de l’hiver et apprécie les eaux froides et les lumières rasantes. C’est en décembre que j’ai retrouvé Ivan Iannaccone, le propriétaire du site pour traquer ces magnifiques poissons. Nous avons commencé dans le haut du parcours, au lac Majeur et aux deux îles en amont. Les plans d’eau sont ici principalement alimentés par un captage déversant de l’eau claire et fraîche. Lunettes polarisantes sur le nez, je décide donc de commencer en nymphe à vue car je repère bien vite quelques beaux sujets près des bordures. Les premiers poissons à attirer mon attention sont bien évidemment les truites aguabonita. Elles ont une robe jaune/orangée et des flancs et opercules allant du rose vif au rouge profond !
Pêche à vue en haut du parcours
Plus l’hiver s’installe et la nature alentour ternit, les arbres exposant leurs troncs nus, et plus les salmonidés du domaine se parent de couleurs chatoyantes et vives. C’est le cas des « gold » mais aussi des différents ombles et arcs-en-ciel du parcours. Je jette donc dans un premier temps mon dévolu sur les truites dorées que je vois très bien, malgré la faible luminosité de ce matin d’hiver. Je commence avec une assez grosse nymphe, peu lestée, montée sur un hameçon de douze mais j’enregistre plusieurs refus. Ces poissons sont très sollicités car ils sont le plus souvent en surface, et ils se voient comme le nez au milieu de la figure… J’affine donc mon montage, je mets une pointe en treize centièmes bien longue et une nymphe noire en autruchon sur un hameçon de 18. Je repère à nouveau deux jolis spécimens qui nagent tranquillement le long du bord. Je reste en retrait et dépose sans un bruit ma nymphette sur leur trajectoire. La première accélère et prend sans rechigner ! Il s’ensuit un beau combat et c’est un mâle aux couleurs chatoyantes qui finit dans mon épuisette, le premier d’une belle série avec cette mouche. De son côté, Ivan décide d’attaquer au streamer. Il connaît son parcours comme sa poche bien entendu, ainsi que les artificielles qui fonctionnent suivant les espèces. Il veut que l’on mette l’accent sur les ombles Alis qui, d’après lui, commencent à être agressifs, la température de l’eau chutant rapidement grâce aux frimas hivernaux de ces derniers jours. Il pêche avec un petit streamer jigg blanc et brillant qui est bien lesté. Pas la peine de lancer trop loin, il faut plutôt prospecter les berges en dandinant ce petit leurre et en le faisant remonter du fond.
Les superbes ombles Alis
Il m’explique que les ombles Alis ont un comportement de prédateur et se comportent vraiment comme des carnassiers, chassant activement les poissons fourrages présents sur le domaine. Il ne met pas longtemps à capturer le premier que l’on voit surgir du fond sur le streamer blanc. Ces salmonidés sont magnifiques, ils sont larges et puissants comme les saumons de fontaine mais sont plus fuselés et ont les immenses nageoires des ombles chevalier. Un beau mélange assez détonant au bout d’une canne légère ! Je me suis bien amusé en nymphe à vue mais il est vrai que j’ai pris principalement des gold et des arcs-enciel. J’écoute donc le maître des lieux et passe en seize centièmes avec un sparkler argenté de ma confection. J’ai du mal à me résoudre à pêcher l’eau et continue à déambuler en bordure, scrutant les postes prometteurs, notamment sous les arbres. J’arrive alors à l’arrivée d’eau d’un petit étang situé entre le lac Majeur et le vaste lac des deux îles amont. Il y a plusieurs beaux poissons qui tournent dans ce courant et je vois clairement que certains ont les grands liserés blancs des nageoires des ombles.
J’approche à genou car le courant se forme sous un arbre et j’effectue un petit lancer arbalète. Ma mouche coule doucement, je la vois plonger vers le fond et effectue alors une animation. Immédiatement, un des ombles se jette dessus. Je le ferre sous la canne et le bride comme je peux car le bougre n’est pas content ! J’arrive à descendre un peu pour le mettre à l’épuisette, voici mon premier omble Alis de la journée ! Je vais en prendre deux autres sur le même poste et avec la même technique, tous autour d’une cinquantaine de centimètres et possédant de magnifiques nageoires, ce qui est agréable pour des poissons d’eau close ! Comme d’habitude au Moulin, la cloche sonne pour nous rappeler au lodge pour un bon repas chaud qui ne fait vraiment pas de mal en cette saison. La table du Moulin est toujours aussi bonne. Cela faisait quelques années que je n’étais pas passé et je retrouve avec plaisir cette cuisine généreuse à base de produits du terroir. Anna a passé la main à Sophie, la charmante épouse d’Ivan qui a su perpétuer ce moment gastronomique et convivial qui participe, au fil du temps, à la renommée du Moulin.
Le soleil de l'après-midi
Ivan n’est pas satisfait des prises de la matinée. Nous n’avons pas touché de gros ombles d’après lui car des spécimens de près de soixante-dix centimètres hantent le domaine. De mon côté je suis moins exigeant, avec une trentaine de poissons pris et cinq espèces de salmonidés je considère avoir déjà pas trop mal pêché ! Je continue donc à « butiner » les plans d’eau et même le bief du moulin qui forme un vrai parcours de rivière de plaine, prenant des arcs-en-ciel, des farios, des golds, des saumons de fontaine et, de temps à autre, un bel omble Alis… Ivan, lui, est en mission ! Il « gratte » les berges creuses et prend des ombles de plus en plus gros. Nous arrivons autour des soixante centimètres, ce qui est vraiment magnifique pour cette espèce mais toujours pas le trophée qu’il espère. La luminosité tombe vite pendant ces mois d’hiver et, bientôt je ne repère plus à nouveau que les aguabonita. Il est temps de passer au streamer et nous continuons à enchaîner les prises. Je prends notamment, en compagnie de Nicolas, le père d’Ivan, deux grosses arcs-en-ciel qui avoisinent les 5 kilos je pense. Ivan lâche régulièrement d’énormes poissons notamment avant les « weekends trophées » qu’il organise. Il n’est pas rare ici de capturer des truites d’une dizaine de kilos…
La lumière rasante du soir est magnifique, faisant ressortir le vert de l’herbe des berges et le doré des arbres où s’accrochent encore les dernières feuilles. Un dernier omble Alis prend la mouche d’Ivan tout en bas du parcours et dans les derniers rayons de lumière de cette belle journée. J’immortalise ce moment qui clôture une magnifique partie de pêche. Je connais le Moulin de Gémages depuis ses débuts. Ces vingt dernières années, de façon plus ou moins régulière, j’ai eu la chance d’y tremper mes mouches toujours avec grand plaisir. La famille Iannaccone, malgré les difficultés qu’elle a rencontrée et elles ont été grandes, a su créer un parcours de pêche de belle qualité, un endroit où l’on se sent bien, un phare dans le brouillard de l’hiver pour tous les moucheurs !
Contacts
Le Moulin de Gémages - 61130 Gémages - France
Mail : info@lemoulindegemages.com
Tel : 02 33 25 15 72
Sites : www.lemoulindegemages.com et www.lm2g-flyfishing.com/le-moulin-de-gemages