Dans les Alpes, les cristivomers ont souvent été introduits dans des lacs de très haute altitude, plus de 2 500 m, là où les conditions environnementales étaient trop difficiles pour les autres espèces. Ils se sont parfois naturalisés, mais ont toujours eu du mal à grossir en lien avec la pauvreté des milieux. Dans ce contexte, le lac de la Plagne situé à 2 144 m « seulement » apparaît comme une exception. Il abrite des ombles d’une taille supérieure à la moyenne, comme en témoigne la capture au leurre d’un spécimen exceptionnel dépassant le mètre en 2023, que nous avions rapportée sur notre site. C’est à la mouche que Simon a décidé de les faire mordre. Un beau défi pour des poissons qui se prennent en général bien au fond, au vairon ou au leurre.
Zoom sur notre guide
Diplômé du BPJEPS moniteur et guide de pêche d’Ahun, Simon Prieto s’est lancé dans l’aventure. Spécialisé dans la traque des salmonidés, en lacs d’altitude et en rivières, toutes les techniques susceptibles de les capturer font partie de ses compétences : mouches, leurres et appâts naturels. Un pêcheur complet car il aime choisir sa technique en fonction des saisons et des conditions. Passionné de nature et de partage, il se fera un plaisir de vous initier à la technique de votre choix ! Également artiste peintre sur matériel de pêche et de chasse, il décore, à la demande, talons de canne en liège, boîtes à mouche et crosses de fusil.
Simon Prieto - Art Pêche et Nature - Tél : 06 01 12 35 38 - Mail : simonprieto73@gmail.com - Site Internet : https://simonprieto-artpecheetnature.com/
A la frontale
Le départ du parking de Rosuel est très matinal. Après deux petites heures de montée en pleine nuit et au pas de course, nous arrivons au bord du lac à 5 h 45, un peu avant le lever du jour comme prévu. En ce milieu du mois de juin, l’ambiance est encore très froide et nous remettons tous les deux des habits secs pour attaquer la partie. Simon qui connaît bien le parcours choisit la rive est du lac pour lancer sa session, c’est celle qui reste la plus longtemps à l’ombre. Il prépare rapidement son matériel, car il sait que les premières heures de la journée sont toujours les meilleures. Des gobages trahissent d’ailleurs la présence de poissons relativement près du bord. L’excitation devient palpable. C’est vraiment grisant.
En bordure
« Tant que la luminosité n’est pas trop forte, les ombles montent sur le plateau herbeux et vaseux pour se nourrir. Il faut savoir en profiter, car après ces salmonidés, qui n’aiment pas la lumière, s’éloignent. C’est alors toujours plus compliqué de les localiser et de les capturer. J’ai amené des streamers, mais je vais commencer à pêcher avec un train de chironomes et en pointe un bobby imitant un alevin de cristi, spécialement confectionné pour le parcours. L’idée est de faire évoluer les deux nymphes le plus naturellement possible, m’explique-t-il. La soie plongeante va entraîner le montage vers le fond et c’est à chaque traction que mes chironomes s’approcheront de cette zone. Sur les pauses, le bobby, avec ses yeux en mousse, fait remonter les chiros de manière naturelle comme s’il s’agissait d’une éclosion de vers de vase. C’est tout le secret de cette pêche. »
Ajustement efficace
Premier lancer. La berge est en pente douce avec une belle pelouse, les conditions pour dérouler la soie à longue distance sont donc parfaites. Quelque chose cloche toutefois au niveau de la présentation. « Je n’arrive pas à faire couler ma ligne comme il le faudrait. La mousse de mon bobby est trop volumineuse et empêche la soie et les deux chironomes de plonger, il faut faire une rectification », précise Simon. Il se saisit alors d’un coupe-ongle et ratiboise le carré de mousse qu’il avait utilisé pour fabriquer son imitation. Ce bricolage express fonctionne puisque cette fois la soie plongeante coule lentement mais sûrement et la première touche ne tarde pas. Le ferrage est très ample pour bien prendre contact avec le poisson qui est ramené délicatement et épuisé. Il est un peu en dessous de la barre « maillée » des 40 cm mais peu importe. Simon est ravi puisque cette prise valide son montage : « Il a mordu sur le chironome d’en bas. Les poissons se nourrissent donc sur le fond, ce qui n’est pas une surprise avec ces diables de cristivomers. »
Les ombles s'enchaînent
Simon reste sur le même poste, quelques faux lancers pour bien dévider la soie et c’est reparti ! Le train de mouche est propulsé à une bonne vingtaine de mètres. Tout en gardant le contact, au cas où une touche ait lieu pendant la descente, notre Savoyard laisse ensuite les imitations descendre jusqu’à ce que la soie soit bien plaquée sur le fond. Et cela au moins pendant une trentaine de secondes, ce qui me paraît une éternité. Il commence alors son animation très lente en tricotant la soie dans sa main, alternant grandes tirées au ralenti et de longues pauses. Habitué à pêcher les cristivomers avec des leurres, je suis saisi par la lenteur et le minimalisme de la gestuelle, tout en douceur. Cela fonctionne toutefois très bien puisqu’à mi-distance environ, et donc vraiment sur le plateau, une nouvelle touche survient. Un second poisson est capturé sur le chironome intermédiaire cette fois-ci, preuve d’une belle activité en ce tout début de matinée. Simon se déplace de quelques mètres et répète la manœuvre qui est maintenant bien rodée : 30 à 40 secondes de descente avant d’entamer une récupération d’escargot pour ne pas trop décoller les larves. Les touches se succèdent et deux ombles dépassant cette fois les 40 cm sont enregistrés au compteur. Notre guide n’hésite pas à mettre franchement les mains dans l’eau glacée pour les relâcher dans de bonnes conditions. Le soleil commence à pointer au-dessus des sommets encore enneigés et il ne va maintenant pas tarder à nous réchauffer. Le décor est splendide. La balade vaut le détour !
Au soleil
Simon prospecte maintenant une petite arrivée d’eau qu’il avait volontairement mise de côté pour négocier le moment où la luminosité commencerait à être intense et la pêche plus difficile. Ce poste s’avère très rentable puisque trois nouveaux poissons seront capturés avec le même montage. Je lui fais remarquer qu’il n’a encore raté aucune touche, ce qui m’impressionne. En bon pédagogue, la réponse fuse : « Tu es habitué à pêcher les lacs de montagne de façon assez agressive avec des bouts de métal ou des leurres souples assez volumineux. Dans ces conditions, c’est normal qu’il y ait du déchet et des attaques mal ciblées. Même au vairon, technique que je pratique assez bien, on rate des poissons. Avec des chironomes on prospecte beaucoup plus lentement, le nombre de touches est donc moins important, car tout est plus long, mais d’un autre côté, la présentation est plus naturelle. Les larves offrent très peu de résistance au moment de l‘aspiration, ça coffre bien et on peut s’approcher des 100 % de capture si on maîtrise bien le ferrage ». Je pense alors à mon rédacteur en chef et nous profitons de la lumière pour faire quelques beaux clichés de poisson bien éclairés. Il est maintenant 10 heures et Simon n’a pas raté son début de matinée. Le reportage est d’ores et déjà réussi. On peut relâcher un peu la pression et aller se restaurer sur l’autre berge. Une pause dans un cadre magnifique.
Le matériel de Simon
- Canne : Vision Stillmaniac 9’9 soie de 7 conçue pour la pêche en réservoir
- Moulinet : JMC Fusion 36
- Soie : Devaux Castlake Plongeante 7 S5 WFSH
- Fluoro : Tortue Trident VX 0,20 mm
Tentative en noyée et au streamer
Plusieurs pêcheurs sont maintenant arrivés sur le parcours dont le garde du Parc de la Vanoise. Lors de son déplacement, Simon prend le temps de discuter avec chacun d’eux de manière à établir de bonnes relations et de glaner des informations pour ses futurs guidages. Il ressort de ses échanges que la pêche à la teigne et à la bombette plongeante a donné de bons résultats ce matin. Après une pause casse-croûte, la pêche va s’avérer, comme Simon l’avait prévu, plus compliquée. Notre guide fait alors tourner ses imitations en remplaçant un des chironomes par une mouche noyée, mais les touches se font attendre. Les cristivomers semblent avoir complètement déserté la zone littorale. Je profite de ce temps mort pour lui demander de me présenter ses boîtes à mouches et ses petits secrets. Il pose alors sa canne et laisse son train de mouche évoluer tout seul. Au moment de relever la ligne, il sent une petite tirée puis plus rien. A priori, la première touche ratée de la journée. Et bien non puisqu’en ramenant, il s’aperçoit que le cristi est toujours pendu. C’est le huitième de la matinée et il a mordu sur la noyée. Bien vu Simon, encore une belle intuition. Il est maintenant temps de redescendre dans la vallée, fourbus par la marche mais heureux.
Renseignements pratiques
Réglementation
- Le lac de la Plagne et son déversoir le Ponturin (bien peuplé en ombles de fontaine) sont gérés par la société de pêche privée des lacs de montagne de Landry-Peisey. Carte à la journée à prendre en ligne sur le site de l’office de tourisme. cinq salmonidés par jour dont trois cristivomers (40 cm).
- Période d’ouverture 2024 : 2 juin au 29 septembre.
- Jours de pêche 2024 : mardi, jeudi, dimanche et jours fériés.
- Vairon interdit.
Adresses utiles
- Office de tourisme de Peisey-Vallandry - Tel. : 04 79 07 94 28
- Association de pêche des lacs de montagne de Landry-Peisey et AAPPMA la Gaule de l’Ormente - Président : Jean-Luc Grognet - Tel. : 06 13 02 61 68
Détaillants
- France Rurale - 244 faubourg de la Madeleine - 73600 Moûtiers - Tel. : 04 79 24 37 50
- Decathlon - 1 227 chemin de la Cassine - 73200 Albertville - Tel. : 04 79 37 47 32
Hébergements
- Refuge d’Entre le lac (2 145 m) : Ancienne bergerie transformée en refuge. Il comprend 40 places (dortoir) et se situe à 300 m des rives du lac de la Plagne, à l’intérieur du Parc national de la Vanoise. Idéal pour être au bord de l’eau au lever du jour. Vente de cartes pour le lac. Tel. : 06 14 11 54 65
- Refuge de Rosuel (1 547 m) : Propriété du Parc national de la Vanoise. Au pied de la montée qui mène au lac de la Plagne. Dortoirs de 4 à 12 lits. Tel. : 06 50 21 91 37
- Camping Les Lanchettes (1 450 m) - Route de Bovereche - 73210 Peisey-Nancroix - Tel. : 04 79 07 93 07
À voir, à faire
- Le tour du massif de Bellecôte, ses glaciers et ses torrents.
- Le lac de Grattaleu, situé dans le parc et ouvert à la pêche.
- L’impressionnant téléphérique Vanoise Express qui relie les stations de la Plagne et des Arcs.
- Notre Dame des Vernettes (art baroque).
- Balade au bord du Nant Bénin, classé rivière sauvage