Avant de rentrer dans le vif du sujet, juste une remarque qui me tient à cœur. Il me semble que dans notre pays, la fermeture de la première catégorie intervient trop tôt. Bien souvent la période estivale est synonyme de canicule et peu favorable à la recherche des truites fario. Une fermeture repoussée jusqu’à la fin novembre permettrait de pêcher dans des conditions plus adaptées sans conséquences sur les populations de truites.
En sèche dans les blocs
À partir de septembre, les températures vont redescendre et la rivière, même si son niveau est encore un peu bas, va retrouver une fraîcheur qui va déclencher l’appétit des truites. Pour ma part, je vais chercher ces dernières truites de l’année sur des postes assez marqués et profonds, souvent encombrés de grosses roches qui retiennent toujours de beaux poissons. L’avantage de ces postes c’est qu’ils forment souvent des entonnoirs de courant qui rassemblent les insectes en cas d’éclosion et concentrent donc machinalement l’activité des truites sur des portions de rivières assez restreintes ! À cette période de l’année, vous allez encore rencontrer de grosses quantités d’insectes, notamment des trichoptères dans de grandes tailles, comme les fameux « gris » qui déclenchent de très beaux gobages. Dans des tailles plus réduites les baétidés feront aussi bouger les truites, il vous faudra donc posséder une boîte bien garnie. Si vous avez un peu de chance, il se peut même que par temps gris, la surface de la rivière se mette en ébullition grâce aux retombées de fourmis ailées qui font perdre leur méfiance aux truites les plus récalcitrantes. Une petite imitation sombre, brune ou noire, avec une aile en CDC fait bien souvent l’affaire dans ces conditions si particulières. Profitez rapidement de cette frénésie qui est généralement de courte durée. Accumuler un maximum de réserves en vue de la période de reproduction est sans aucun doute la raison de cette activité alimentaire, même si celle-ci est de mon point de vue liée d’abord au retour de températures plus clémentes pour les truites.
Des nymphes qui nagent toutes seules
Si vous avez la chance de pratiquer un cours d’eau transparent, je vous conseille de faire le coup du matin en nymphe à vue. C’est bien souvent au lever du jour que l’on observe de grosses truites en vadrouille non loin du bord. Faites preuve d’une extrême discrétion (j’ai souvent pris de grosses truites à plat ventre) car elles connaissent la musique et de nombreux pêcheurs les ont déjà tentées au fil de la saison. Les nymphes d’ensemble qui imitent baétidés et trichoptères sont les meilleures ! Confectionnées en matériaux naturels qui vivent dans l’eau, elles vous assureront de belles prises. Un bas de ligne qui fait deux fois la longueur de votre canne est idéal et il devra se terminer par une pointe fine. Posez toujours votre mouche bien en amont du poisson, afin qu’elle nage toute seule dans l’onde ! Vous verrez, les résultats sont surprenants ! Dans le cas de ces pêches de bordure, l’essentiel est de bien rester caché et de faire le moins de gestes possibles. Une belle gestuelle avec 20 mètres de soie en l’air n’est pas toujours possible et c’est parfois un simple lancer arbalète qui prendra la truite.
La pêche en nymphe au fil, quant à elle, reste bien sûr praticable partout. Du côté de la pêche au fil, quand les truites ne sont pas visibles, misez sur une pêche fine avec des mouches légères. Si les nymphes de type perdigone ont le vent en poupe, je leur préfère souvent en fin de saison des mouches en dubbing léger ou en quill de faisan qui ont un aspect plus naturel ! Dans les grands courants, le but va consister à faire dériver sa ou ses nymphes de manière uniforme, sans à-coup et sans dragage. Les truites attablées sur des proies viendront sans problème prendre vos nymphes entre deux eaux. En fin de saison les touches sont furtives et rapides, il ne faudra donc pas quitter votre bas de ligne des yeux dès l’immersion des nymphes. Si la rivière est à son niveau normal, je préfère les montages avec des billes noires ou cuivrées que les truites connaissent moins que les classiques billes or. Mais c’est à vous de faire des essais pour trouver le « pattern » du moment.
Une peau de lapin
Dernière technique à mettre en œuvre pour finir cette belle saison, il s’agit de la pêche au streamer qui n’a pas toujours bonne réputation. Vairons et chabots font largement partie du régime alimentaire des truites et cette fin de saison ne fait pas exception. Il existe plusieurs de manières de pêcher efficacement au streamer mais il faudra surtout concentrer votre action sur le lever du jour. En effet, j’ai remarqué que les résultats étaient bien meilleurs tôt le matin, désolé pour les « lève-tard ». De nombreux modèles de streamers peuvent convenir mais j’ai une préférence pour les streamers très lestés en tête dont le corps est monté en peau de lapin. À la longue, ces montages se montrent très solides et surtout terriblement efficaces. Comme je pratique très souvent en soie flottante, j’ai besoin de modèles qui descendent vite dans la couche d’eau. Vous me direz que les lancers ne doivent pas être faciles. Vous avez entièrement raison c’est pour cela que je pêche surtout des secteurs encombrés où il est inutile de lancer loin. Il ne sera pas la peine de « stripper » votre mouche comme on peut le faire en lac. Au contraire, car les truites sont méfiantes à cette période de l’année.
Un streamer lourd qui glisse sur le fond quasiment comme lorsque l’on pêche en nymphe au fil ou à la « roulette », vu son poids, va déclencher des touches. Ce sont souvent de gros poissons qui vont se prendre à ce piège, donc gardez la main légère au ferrage. Votre streamer va évoluer sur le fond à la manière d’un petit chabot blessé et c’est cette nage en détresse qui va déclencher des attaques. S’il ne fallait pêcher avec une seule couleur, ce serait sans hésiter le noir, mais le lapin naturel et le marron fonctionne aussi parfaitement. Une gorge orange et une queue noire, déclenche certains jours plus de touches, surtout si les eaux sont un peu piquées. À vous de trouver la bonne nuance ! À mes yeux, le plus important étant la manière dont dérive le streamer sur le fond de la rivière…
Un bas de ligne pour les trois techniques
Il est tout à fait possible de passer de la sèche, à la nymphe puis au streamer si on ne souhaite pas s’encombrer de deux cannes. Voici comment confectionner un bas de ligne plutôt polyvalent qui va vous permettre d’éviter trop de manipulations. Si votre soie flottante se termine par une boucle préformée, faites une boucle sur un brin de 65 cm en 45/100, puis nouez 55 cm en 40/100, 45 cm en 35/100, 35 cm en 30/100, 30 cm en 25/100 et 25 cm en 20/100. Sur ce brin formez une micro-boucle. Pour pêcher en sèche, on refait un dégressif en 16, puis 12 pour la pointe. Idem pour la nymphe à vue, en faisant varier la longueur de pointe. En nymphe au fil, on ajoute un brin de fluo en 16/100 à la micro-boucle puis une pointe en 12/100. Pour le streamer au fil, on noue un bon 16/100 sur deux bons mètres directement à la micro-boucle et le tour est joué !