Assez curieusement, la continuité écologique est une notion apparue récemment. En effet, c’est en 2000 que ce principe est né, avec la directive-cadre sur l’eau. Pourquoi « curieusement » ? Car la continuité écologique est définie par l’Office français de la biodiversité comme « la libre circulation des organismes vivants et leur accès aux zones indispensables à leur cycle de vie, le bon déroulement du transport naturel des sédiments, ainsi que le bon fonctionnement des réservoirs de biodiversité ». Or, cette « libre circulation » dans un fleuve ou dans une rivière ne doit pas être entravée depuis 20 ans seulement. Si l’on prend l’exemple des barrages, on s’aperçoit que ces constructions sont nées il y a environ 5000 ans ! Mais ce n’est apparemment que depuis 23 ans que le législateur s’est aperçu qu’un barrage pouvait nuire à l’écosystème d’une rivière. Il n’est jamais trop tard, mais tout de même…
Un gros état des lieux
Après 2000, il aura encore fallu attendre neuf ans pour que des mesures plus terre à terre soient prises. C’est ainsi qu’en 2009, l’État a concrétisé sa volonté de préserver la continuité écologique au travers d’un plan de restauration. Plusieurs axes étaient alors dégagés : création d’un référentiel national des obstacles, définition des bassins prioritaires, révision de programmes antérieurs, vérification et mise aux normes de constructions préexistantes… Mais ces bonnes résolutions se sont rapidement heurtées à plusieurs coups d’arrêt. En 2012, notamment, avec des propriétaires de moulins ou de microcentrales hydrauliques qui ont vu ces textes comme nuisibles à leur activité. En vérité, la continuité écologique est peu conciliable avec ce genre d’équipements : les intérêts en jeu sont radicalement différents. Ainsi, les propriétaires de moulins hydrauliques rappellent la valeur patrimoniale de leurs ouvrages et la production d’énergie renouvelable. Si ces affirmations sont bien exactes, il n’en demeure pas moins qu’une construction qui se sert de l’eau a un impact automatique sur la rivière ou sur le fleuve où elle se trouve.
En avant ou en arrière ?
Et le débat est toujours d’actualité ! En 2022, plusieurs décisions ont été rendues et sont parfaitement contradictoires. Un régime dérogatoire à la continuité écologique avait été créé, considéré comme conforme par le Conseil constitutionnel en mai 2022. Quelques semaines après, en juillet 2022, le Conseil d’État, quant à lui, avait invalidé le recours à ces textes, se fondant sur la législation européenne… Si la continuité écologique semble peu à peu édifiée en droit français, elle sera vraisemblablement grandement aidée par le droit européen qui semble moins enclin à ménager des intérêts manifestement antagonistes.
Que dit la loi ?
La loi précise la définition de l’obstacle. De l’article R214- 109 du Code de l’environnement, on retiendra notamment que l’obstacle nuit à la circulation des espèces et au transport naturel des sédiments ou qu’il interrompt des connexions avec les réservoirs biologiques… Bref, il stoppe un flux naturel et remet en cause l’équilibre de l’écosystème.