Procédons tout d’abord à quelques petits rappels élémentaires. Si le texte de 1958, évoqué en introduction, n’est pas pionnier en la matière (un précédent arrêté de 1941 organisait d’ores et déjà une catégorisation des cours d’eau), il reste encore applicable à ce jour. Depuis plusieurs décennies, les rivières sont divisées en deux catégories au regard des espèces qu’elles contiennent.
Question de populations
La première catégorie est majoritairement peuplée de salmonidés, tandis que la seconde est principalement habitée par des cyprinidés. Le décret de 1958, consultable sur le site Légifrance, reprend la liste des cours d’eau français, en précisant s’ils appartiennent à la première ou à la deuxièmecatégorie. L’ancienneté de ce texte peut légitimement soulever des interrogations quant à sa pertinence: en 2024, la répartition piscicole est-elle toujours la même qu’en 1958 ?
Des évolutions locales
La division première catégorie/deuxième catégorie n’est pourtant pas inscrite dans le marbre. Le texte de 1958 n’est « qu’un » décret. En d’autres termes, il est facile à réformer et est donc susceptible d’être aisément amendé en fonction des évolutions réelles des populations piscicoles. Mais, plus encore, c’est un texte général où les dérogations locales sont possibles. La liste de 1958 reste applicable tant qu’un préfet n’a pas pris un arrêté concernant le même cours d’eau, plus précis ou plus adapté à la réalité du terrain. C’est pourquoi ces débats sur le plan national, même s’ils sont naturellement pertinents compte tenu de l’existence nationale de ces deux catégories, seraient, en réalité, à mener au plan départemental, en s’appuyant sur l’article R436-43 du Code de l’environnement.
Critiques et restrictions
Cette structuration conduit à des critiques : populations qui n’ont plus rien à voir avec celles des décennies passées, fermetures inadaptées, interdictions aberrantes… Il n’est pas inexact de constater que, depuis bientôt 66 ans, la nature a parfois transmué. Pour autant, est-il nécessaire de créer une troisième catégorie ou bien, à l’inverse, d’appliquer une seule et même réglementation partout en France ? Rien n’est moins sûr ! En réalité, les dysfonctionnements évoqués sont généralement le fruit d’une classification désuète. C’est pourquoi certaines fédérations envisagent de solliciter la modification de la classification d’un cours d’eau auprès des services préfectoraux. Tel est le cas s’agissant du gave d’Oloron, dans les Pyrénées-Atlantiques et les Landes. Réputée pour sa population de saumons, cette rivière présente des portions soumises à la réglementation de deuxième catégorie : ouverture de la pêche toute l’année, possibilité de pêcher à bord d’une embarcation, pas de limitations d’esches. Mais pareil projet provoque de nombreux remous, d’autant qu’il s’accompagnerait d’une nette restriction des modes de pêche autorisés, s’agissant du gave d’Oloron, en tout cas. La logique est la suivante : préserver le saumon au mieux, compte tenu de sa fragilité.
À la main du préfet
L’article R436- 43 du Code de l’environnement indique que le classement des cours d‘eau, des canaux et des plans d’eau est fixé par arrêté du préfet ou, s’agissant d’un cours d’eau limitrophe à deux départements, ou plus, d’un arrêté conjoint des préfets concernés. Les fédérations départementales de pêche peuvent donc se rapprocher de l’administration si besoin.